Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/203

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Thésée.

Mégare m’avait
dit le secret de son père ;
Il m’a valu l’honneur de m’exposer pour tous ;
Mais je n’en abusais que pour mourir pour vous.
Le succès a passé cette triste espérance :
Ma flamme en vos périls ne voit plus d’apparence.
Si l’on peut à l’oracle ajouter quelque foi,
Ce fils a de sa main versé le sang du roi ;
Et son ombre, en parlant de punir un grand crime,
Dit assez que c’est lui qu’elle veut pour victime.


Dircé.

Prince, quoi qu’il en soit, n’empêchez plus ma mort,
Si par le sacrifice on n’éclaircit mon sort.
La reine, qui paraît, fait que je me retire :
Sachant ce que je sais, j’aurais peur d’en trop dire ;
Et comme enfin ma gloire a d’autres intérêts,
Vous saurez mieux sans moi ménager vos secrets :
Mais puisque vous voulez que mon esprit revive,
Ne tenez pas longtemps la vérité captive.



Scène II

.

Jocaste.

Prince, j’ai vu Phorbas ; et tout ce qu’il m’a dit
À ce que vous croyez peut donner du crédit.
Un passant inconnu, touché de cette enfance
Dont un astre envieux condamnait la naissance,
Sur le mont Cythéron reçut de lui mon fils,
Sans qu’il lui demandât son nom ni son pays,
De crainte qu’à son tour il ne conçût l’envie
D’apprendre dans quel sang il conservait la vie.
Il l’a revu depuis, et presque tous les ans,