Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/605

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


ACTE II.


Scène première.

PLAUTINE, FLAVIE.
PLAUTINE.

Dis-moi donc, lorsque Othon s’est offert à Camille,
A-t-il paru contraint ? a-t-elle été facile ?
375Son hommage auprès d’elle a-t-il eu plein effet ?
Comment l’a-t-elle pris, et comment l’a-t-il fait[1] ?

FLAVIE.

J’ai tout vu ; mais enfin votre humeur curieuse
À vous faire un supplice est trop ingénieuse.
Quelque reste d’amour qui vous parle d’Othon,
380Madame, oubliez-en, s’il se peut, jusqu’au nom.
Vous vous êtes vaincue en faveur de sa gloire,
Goûtez un plein triomphe après votre victoire :
Le dangereux récit que vous me commandez
Est un nouveau combat où vous vous hasardez.
385Votre âme n’en est pas encor si détachée
Qu’il puisse aimer ailleurs sans qu’elle en soit touchée.
Prenez moins d’intérêt à l’y voir réussir,
Et fuyez le chagrin de vous en éclaircir.

PLAUTINE.

Je le force moi-même à se montrer volage ;

  1. « Racine a encore pris cette situation dans sa tragédie de Bajazet (acte III, scène i). Atalide a envoyé son amant à Roxane ; elle s’informe en tremblant du succès de cette entrevue, qu’elle a ordonnée elle-même, et qui doit causer sa mort. » (Voltaire.)