Par quelle illusion m’oses-tu consulter ?
Si tu démens tes yeux, croiras-tu mon suffrage ?
Et ne peux-tu sans moi connaître son visage ?
Tu l’as vu tant de fois, au milieu des combats,
Montrer, à tes périls, ce que pesoit son bras,
Et l’épée à la main, disputer en personne,
Contre tout ton bonheur, sa vie et sa couronne.
Si tu cherches une aide[1] à traiter d’imposteur
Un roi qui t’a fermé la porte de mon cœur,
Consulte Garibalde, il tremble à voir son maître :
Qui l’osa bien trahir l’osera méconnoître ;
Et tu peux recevoir de son mortel effroi
L’assurance qu’enfin tu n’attends pas de moi.
Un service si haut veut une âme plus basse ;
Et tu sais…
Sous l’espoir de jouir de ma perplexité,
Vous cherchez à me voir l’esprit inquiété ;
Et ces discours en l’air que l’orgueil vous inspire
Veulent persuader ce que vous n’osez dire,
Brouiller la populace, et lui faire après vous
En un fourbe impudent respecter votre époux.
Poussez donc jusqu’au bout, devenez plus hardie :
Dites-nous hautement…
Il ne peut être ici que ce que tu voudras :
Tes flatteurs en croiront ce que tu résoudras.
Je n’ai pas pour t’instruire assez de complaisance ;
Et puisque son malheur l’a mis en ta puissance,
- ↑ Les anciennes éditions, de 1660-1692, donnent une aide, au féminin. Celle de Voltaire (1764) porte un aide.