Aller au contenu

Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 7.djvu/186

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
174
ATTILA.

J’oserai jusqu’au bout lui servir de ministre,
Et faire exécuter toutes ses volontés
Sur vous et sur des rois contre moi révoltés.
Par des crimes nouveaux je punirai les vôtres,
Et mon tour à périr ne viendra qu’après d’autres.

HONORIE.

Ton sang, qui chaque jour, à longs flots distillés[1],
S’échappe vers ton frère et six rois immolés,
Te diroit-il trop bas que leurs ombres t’appellent ?
Faut-il que ces avis par moi se renouvellent ?
Vois, vois couler ce sang qui te vient avertir,
Tyran, que pour les joindre il faut bientôt partir.

ATTILA.

Ce n’est rien ; et pour moi s’il n’est point d’autre foudre,
J’aurai pour ce départ du temps à m’y résoudre.
D’autres vous envoiroient[2] leur frayer le chemin ;
Mais j’en laisserai faire à votre grand destin,
Et trouverai pour vous quelques autres vengeances,
Quand l’humeur me prendra de punir tant d’offenses.


Scène IV.

ATTILA, VALAMIR, ARDARIC, HONORIE, ILDIONE, OCTAR.
ATTILA, à Ildione.

Où venez-vous, Madame, et qui vous enhardit
À vouloir voir ma mort qu’ici l’on me prédit ?
Venez-vous de deux rois soutenir la querelle,
Vous révolter comme eux, me foudroyer comme elle,

  1. Sanguis, qui ei solite de naribus effluehat… (Jornandès, de Getarum rebus gestis, chapitre xlix.) Voyez ci-dessus, p. 105, note 1.
  2. Ici Voltaire (1764), bien qu’il ait laissé ailleurs (au vers 833 par exemple) envoyerez, donne enverroient.