Peut-être auriez-vous peine à le bien étouffer,
Si votre ambition n’en savoit triompher.
Moi qui n’ai que les Dieux au-dessus de ma tête,
Qui ne vois plus de rang digne de ma conquête,
Du trône où je me sieds puis-je aspirer à rien
Qu’à posséder un cœur qui n’aspire qu’au mien ?
C’est là de mes pareils la noble inquiétude :
L’ambition remplie y jette leur étude ;
Et sitôt qu’à prétendre elle n’a plus de jour,
Elle abandonne un cœur tout entier à l’amour.
Elle abandonne ainsi le vôtre à cette reine,
Qui cherche une grandeur encor plus souveraine.
[1].
Bérénice aime Tite, et non pas l’Empereur ;
Elle en veut à mon cœur, et non pas à l’empire[2].
D’autres avoient déjà pris soin de me le dire,
Seigneur ; et votre reine a le goût délicat
De n’en vouloir qu’au cœur, et non pas à l’éclat.
Cet amour épuré que Tite seul lui donne
Renonceroit au rang pour être à la personne !
Mais on a beau, Seigneur, raffiner sur ce point,
La personne et le rang ne se séparent point.
Sous les tendres brillants de cette noble amorce
L’ambition cachée attaque, presse, force ;
Par là de ses projets elle vient mieux à bout ;
Elle ne prétend rien, et s’empare de tout.
L’art est grand ; mais enfin je ne sais s’il mérite