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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 8.djvu/43

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ÉPÎTRE.

grand prélat a pris plaisir de me faire voir des premiers. Il me l’a fait lire, il me l’a fait admirer avec lui, et pour vous rendre justice partout durant cette lecture, je ne faisois que répéter les éloges que chaque vers tiroit de sa bouche. Mais entre tant de choses excellentes, rien ne fit alors et ne fait encore tous les jours une si forte impression sur mon âme, que ces rares pensées de la mort que vous y avez semées si abondamment[1]. Elles me plongèrent dans une réflexion sérieuse qu’il falloit comparoître devant Dieu, et lui rendre compte du talent dont il m’avoit favorisé. Je considérai ensuite que ce n’étoit pas assez de l’avoir si heureusement réduit à purger notre théâtre des ordures que les premiers siècles y avoient comme incorporées, et des licences que les derniers y avoient souffertes ; qu’il ne me devoit pas suffire d’y avoir fait régner en leur place les vertus morales et politiques, et quelques-unes même des chrétiennes, qu’il falloit porter ma reconnoissance plus loin, et appliquer toute l’ardeur du génie à quelque nouvel essai de ses forces qui n’eût point d’autre but que le service de ce grand maître et l’utilité du prochain. C’est ce qui m’a fait choisir la traduction de cette sainte morale, qui par la simplicité de son style ferme la porte aux plus beaux

    de la première édition, qui est Philomusi Musæ juveniles, s’accorde mieux que le précédent avec ce que nous dit ici Corneille. Dans la dédicace du recueil écrite par le chanoine G. de Furstenberg et datée de la veille des nones d’avril 1645, on lit ces mots : Auctor Ipse Philomothus, idemque non nullis Phllomusus.

  1. La pensée de la mort revient en effet fort souvent dans les vers latins de Fabio Chigi. Plusieurs de ses poëmes sont des hommages à des personnes défuntes ou des épitaphes, et elle trouve place dans bien d’autres sujets, dans la première pièce du volume, par exemple, où on lit ces vers :

    Devota morti cetera defluunt
    Fatoque cedunt irreparabili, etc.