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fois plus gros que les autres. Le gouvernement des Abeilles, aussi-bien que leur oeconomie, passe pour une des merveilles de la nature. Elles ne piquent jamais, qu’elles ne laissent leur aiguillon dans la playe, ce qui est cause de leur mort, parce que l’effort qu’elles font, rompt leurs intestins. Il y en a de sauvages, & ce que rapporte le Pere du Tertre, Missionnaire Dominicain, dans son Histoire des Antilles, en est une preuve. Il dit qu’il a fait ce qu’il a pû pour en apprivoiser en ce Pays-là, sans qu’il ait pû en venir à bout. Il fit scier le tronc d’un arbre où il y avoit une ruche ; il la mit sur une souche qu’il environna de cendres pour la garantir des Fourmis ; mais tout cela ne servit de rien. Elles ne demeurerent dans la ruche qu’autant de temps qu’il leur en fallut pour enlever tout ce qui estoit dedans, & quand elles l’eurent vuidée, elles l’abandonnerent entierement. Il ajoûte que ces Abeilles sont la moitié plus petites que celles de France, & qu’elles n’ont point du tout d’aiguillon. Elles font leur petit ménage dans des arbres creux, & leur miel se trouve dans de petites bouteilles de cire, grosses comme des œufs de pigeon. Chacune de ces bouteilles tient un peu plus qu’une demy-once de miel fort clair & bien épuré. Sa couleur est d’ambre, & il a un goust fort aromatique. Les plus abondantes ruches ne rendent que cinq ou six livres de miel, & environ trois livres de cire noire, plus molle que celle de l’Europe, & qui ne sçauroit estre blanchie, quelque industrie que l’on y puisse apporter. Ceux qui ont écrit de l’Ethiopie, rapportent qu’il s’y trouve un tres-grand nombre d’Abeilles, sur tout de petites Abeilles noires, qui font d’excellent miel, & dont la cire est d’une blancheur extraordinaire. Elles n’ont point d’aiguillon, ce qui fait que manquant d’armes pour se défendre, elles se cachent dans des creux de la terre, où elles entrent par de petits trous qu’elles ont l’adresse de boucher sitôt que quelqu’un paroist. Pour cela elles se mettent quatre ou cinq au trou, & ajustent leurs restes en sorte qu’estant à niveau l’une de l’autre, & avec la terre, on ne les découvre point. Nicod fait venir Abeille du Latin Apes ou apicula, & les Latins ont donné le nom d'Apes aux Abeilles, parce qu’elles naissent sans pieds.

ABELIENS. s. m. Heretiques d’Afrique dans le Diocese d’Hipponne. Ils furent ainsi nommez, parce qu’ils suivoient la doctrine d’un certain Abel, qui disoit que la solide vertu consistoit à se marier, & à demeurer ensuite dans la continence. Ils tenoient aussi pour illegitimes tous les enfans qu’on n’adoptoit pas. On leur fit connoistre l’erreur & la superstition de leur creance, & ils rentrerent dans le sein de l’Eglise. On leur donna aussi le nom d'Abelonites.

ABELISER. v. a. Vieux mot. Charmer, ravir.

Si m’abelisoit & féoit.

ABERHAVRE. s. m. Vieux mot. Emboucheure de riviere. C’est delà qu’est venu le mot de Havre.

ABI

AB-INTESTAT. Terme de Jurisprudence. On appelle Heritier ab-intestat, Celui qui herite d’un homme qui est mort sans avoir fait de testament.

ABL

ABLAB. s. m. Arbrisseau de la hauteur d’un seps de vigne, dont les rameaux s’étendent de mesme. Il croist en Égypte & subsiste un siecle, également vert en hiver & en esté. Ses feüilles ressemblent à celles de nos Feves de Turquie, & ses fleurs, qu’il porte deux


fois l’année, au Printems & en automne, n’en different pas beaucoup. Cette plante a pour fruit des feves noires, rougeatres, marquetées de brun, qui sont bonnes contre la toux, & contre la retention d’urine. Elles sont renfermées dans des gousses longues & larges, & servent de nourriture aux Egyptiens.

ABLAIS. s. m. On appelle ainsi dans quelques Coûtumes la dépoüille des bleds ; & dans les lieux qui y sont assujettis, il faut donner caution au Seigneur des droits qu’il a sur les fruits & ablais saisis avant qu’il soit permis de les enlever. On fait venir ce mot du Latin Ablata, Choses emportées.

ABLE. s. m. Petit poisson de riviere, environ de la grandeur d’un doigt. Il a le dos vert, & le ventre blanc. On l’appelle aussi Ablette, & en Latin Alburnus. Quelques-uns font venir ce mot d'Albus, Blanc, en transposant les deux lettres b & l.

ABLERET. s. m. Terme de pesche. Sorte de filet quarré que l’on attache au bout d’une perche, & avec quoy on pesche des Ables, & d’autres petits poissons de cette nature.

ABLUTION. s. f. Ce terme est particulier aux Religieux qui portent des habits blancs, & il se dit de l’action de les nettoyer & de les blanchir.

On appelle aussi Ablution, en termes de Medecine, La preparation qui se fait d’un medicament ; afin de le purger des mauvaises qualitez qu’il pourroit avoir.

ABO

ABOILAGE. s. m. Vieux mot qui se trouve encore dans quelques Coustumes, & qui signifie Un Droit de Seigneur sur les Abeilles. On a dit aussi Aboile, pour dire, Abeille.

ABONNER. v. a. Vieux mot. On a dit Abonner un heritage, pour dire, Y mettre des bornes. Cela est venu de ce qu’on disoit autrefois Bonnes pour Bornes.

ABONNIR. v. a. Terme de Potier. On dit Abonnir le carreau, pour dire, Le secher à demy, le mettre en estat de rebattre.

ABORDAGE. s. m. Terme de Marine dont on se sert en parlant d’un Vaisseau qui en heurte un autre, ou par accident, ou exprés, pour tâcher de l’enlever.

ABORDER. v. a. Terme de Marine. On dit Aborder un Vaisseau de bout au corps, pour dire, Mettre l’éperon dans le flanc d’un Vaisseau, & on dit de deux Vaisseaux qui s’approchant en droiture s’enferrent par leurs éperons, qu’Ils s’abordent de franc étable.

On dit en termes de Fauconnerie, Aborder la remise sous le vent, Lorsque la perdrix poussée par l’oiseau a gagné quelque buisson, & cela se fait afin que les chiens puissent mieux sentir la perdrix qui s’est cachée dans la haye.

ABORENER. v. a. Vieux mot. Dédaigner, hair.

ABORIGENES. s. m. Nom qui fut donné à d’anciens peuples d’Italie, comme estant sans origine. Il y a diverses opinions là-dessus. Selon Genebrard, c’estoient de ces Peuples infidelles chassez par Josué de la terre de Chanaan. D’autres pretendent qu’ils sont venus d’Arcadie, & qu’on les nomma Aborigenes, comme ayant esté les Auteurs de leur race. Quelques-uns leur donnent Saturne pour leur premier Roy, & il y en a qui disent que Janus avant Saturne, ayant gardé ceux de ses sujets qui avoient de la vertu, renvoya les autres qu’il appella Aborigenes, comme gens qu’il abhorroit. Ceux-cy vinrent au-delà du Tybre, & furent nommez Latins, du nom de leur Roy La-


Tome III. A ij