Page:Corneille - Imitation de Jésus-Christ, édition 1862.djvu/350

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le cœur les goûte bien, et l’âme les admire ;
tout l’homme les sent croître à force de t’aimer ;
mais la bouche ne les peut dire.

Tu ne te lasses point, Seigneur, de cet amour,
et j’en porte sur moi des marques infaillibles :
tes bontés incompréhensibles
du néant où j’étois m’ont daigné mettre au jour.
J’ai couru loin de toi vagabond et sans guide ;
pour un fragile bien j’ai quitté le solide,
et tu m’as rappelé de cet égarement ;
tu fais plus : pour t’aimer tu m’ordonnes de vivre,
et joins à la douceur de ce commandement
la clarté qui montre à le suivre.

Ô fontaine d’amour, mais d’amour éternel,
après tant de bienfaits que dirai-je à ta gloire ?
Pourrai-je en perdre la mémoire,
quand tu ne la perds pas d’un chétif criminel ?
Au milieu de ma chute et courant à ma perte,
par delà tout espoir j’ai vu ta grâce ouverte
répandre encor sur moi des rayons de pitié,
et ta miséricorde, excédant tous limites,
accabler un pécheur d’un excès d’amitié
qui surpasse tous les mérites.