Page:Corneille - Imitation de Jésus-Christ, édition 1862.djvu/38

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que j’ai fait parler en vers, je dirois que rien n’appartient plus justement à votre sainteté que ce portrait achevé d’elle-même, et qu’à jeter l’œil, d’un côté sur les hautes leçons qu’il nous fait, et de l’autre sur les miracles continuels de votre vie, on ne voit que la même chose. J’ajouterai, très-saint-père, que rien n’est si puissant pour convaincre le lecteur que de lui donner en même temps le précepte et l’exemple. Soit que mon auteur nous invite à la retraite intérieure, soit qu’il nous exhorte à la simplicité des mœurs, soit qu’il nous instruise de ce que nous devons au prochain, soit qu’il nous pousse au détachement de la chair et du sang, soit qu’il nous apprenne à déraciner l’amour-propre par une abnégation sincère de nous-mêmes, soit qu’il tâche à nous faire goûter les saintes douceurs de la souffrance en nous expliquant ses privilèges, soit qu’il s’efforce à nous porter jusque dans le sein de Dieu, pour nous unir étroitement avec lui par une amoureuse acceptation de toutes ses volontés et une assidue recherche de sa gloire en toutes choses : quoi qu’il nous ordonne, quoi qu’il nous conseille, mettre le nom de votre sainteté à la tête de ses enseignements, c’est ne laisser d’excuse à personne, et faire voir que toutes ces vertus n’ont rien d’incompatible avec les grandeurs, avec l’abondance et avec les soins de toute la terre. Ces raisons sont fortes, mais elles ne l’étoient pas assez pour l’emporter sur la connoissance de mon peu de mérite ; et le moindre retour que je faisois sur moi-même dissipoit toute la hardiesse qu’elles m’avoient inspirée, sitôt que j’envisageois cette inconcevable disproportion de mon néant à la première dignité du monde. J’avois toutefois assez de courage pour ne descendre que d’un degré, et ne choisir pas un moindre protecteur que celui à qui je dois mes premiers respects dans l’église après le Saint-Siège : je parle de Monsieur l’arche