Page:Corneille - Imitation de Jésus-Christ, édition 1862.djvu/456

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jusqu’à te plaire trop en ce qu’il a d’appas,
et prendre quelque gloire en ce que tu n’es pas.

Quelque grâce sur toi qu’il m’ait plu de répandre,
je puis, quand il me plaît, te l’ôter et la rendre.
Quelques dons que j’accorde à tes plus doux souhaits,
ils sont encore à moi quand je te les ai faits :
je te donne du mien quand ce bonheur t’arrive,
et ne prends point du tien alors que je t’en prive.
Ces biens, ces mêmes biens, après t’être donnés,
font part de mes trésors dont ils sont émanés,
et leur perfection tirant de moi son être,
quand je t’en fais jouir, j’en suis encor le maître.

Tout est à moi, mon fils, tout vient, tout part de moi ;
reçois tout de ma main sans chagrin, sans effroi :
si je te fais traîner un destin misérable,
si je te fais languir sous l’ennui qui t’accable,
ne perds sous ce fardeau patience ni cœur :
je puis en un moment ranimer ta langueur ;
je puis mettre une borne aux maux que je t’envoie,
et changer tout leur poids en des sujets de joie ;
mais je suis toujours juste en te traitant ainsi,
toujours digne de gloire, et j’en attends aussi ;