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Qui n’en sont pas toujours de fort sûrs témoignages ;
Je n’ai que sa parole, et ne veux que sa foi.


PHILANDRE.


Je connois donc quelqu’un plus avancé que toi 197.


TIRCIS.


J’entends qui tu veux dire, et pour ne te rien feindre.
Ce rival est bien moins à redouter qu’à plaindre.
Éraste, qu’ont banni ses dédains rigoureux…


PHILANDRE.


Je parle de quelque autre un peu moins malheureux.


TIRCIS.


Je ne connois que lui qui soupire pour elle.


PHILANDRE.


Je ne te tiendrai point plus longtemps en cervelle 198 :
Pendant qu’elle t’amuse avec ses beaux discours,
Un rival inconnu possède ses amours,
Et la dissimulée, au mépris de ta flamme,
Par lettres chaque jour lui fait don de son âme.


TIRCIS.


De telles trahisons lui sont trop en horreur.


PHILANDRE.


Je te veux par pitié tirer de cette erreur.
Tantôt, sans y penser, j’ai trouvé cette lettre ;
Tiens, vois ce que tu peux désormais t’en promettre.



D’une vraie amitié sont d’inutiles gages ;
Je n’en veux et n’en ai point d’autre que sa foi x.
phil. Je sais donc bien quelqu’un plus avancé que toi.
tirs. Plus avancé que moi ? j’entends qui tu veux dire,
Mais il n’a garde d’être en état de me nuire :
Ce n’est pas d’aujourd’hui qu’Éraste a son congé.
phil. Celui dont je te parle est bien mieux partagé.
tirs. Je ne sache que lui qui soupire pour elle. (1633-57)

197. Var. J’en connois donc quelqu’un plus avancé que toi. (1663)

198. Tenir en cervelle, inquiéter, tenir dans l’inquiétude. Voyez le Lexique.

x. Je n’en veux et n’en ai point d’autres que sa foi. (1644-57)