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Pymante

Où s’est-elle cachée ? où l’emporte sa fuite ?

Où faut-il que ma rage adresse ma poursuite ?

La tigresse m’échappe, et, telle qu’un éclair,

En me frappant les yeux, elle se perd en l’air ;

Ou plutôt, l’un perdu, l’autre m’est inutile ;

L’un s’offusque du sang qui de l’autre distille.

Coule, coule, mon sang : en de si grands malheurs,

Tu dois avec raison me tenir lieu de pleurs :

Ne verser désormais que des larmes communes,

C’est pleurer lâchement de telles infortunes.

Je vois de tous côtés mon supplice approcher ;

N’osant me découvrir, je ne me puis cacher.

Mon forfait avorté se lit dans ma disgrâce,

Et ces gouttes de sang me font suivre à la trace.

Miraculeux effet ! Pour traître que je sois,

Mon sang l’est encor plus, et sert tout à la fois

De pleurs à ma douleur, d’indices à ma prise,

De peine à mon forfait, de vengeance à Dorise.

O toi qui, secondant son courage inhumain,

Loin d’orner ses cheveux, déshonores sa main,

Exécrable instrument de sa brutale rage,

Tu devais pour le moins respecter son image ;

Ce portrait accompli d’un chef-d’œuvre des cieux,