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Rentre, pauvre abusée, et dedans tes malheurs,
Si tu ne les retiens, cache du moins tes pleurs !


Scène IV

Lysandre, Aronte.


Aronte.

Eh bien, qu’en dites-vous ? et que vous semble d’elle ?

Lysandre.

Hélas ! pour mon malheur, tu n’es que trop fidèle,
N’exerce plus tes soins à me faire endurer ;
Ma plus douce fortune est de tout ignorer :
Je serais trop heureux sans le rapport d’Aronte.

Aronte.

Encor pour Dorimant, il en a quelque honte ;
Vous voyant, il a fui.

Lysandre.

Vous voyant, il a fui. Mais mon ingrate alors,
Pour empêcher sa fuite a fait tous ses efforts,
Aronte, et tu prenais ses dédains pour des feintes !
Tu croyais que son cœur n’eût point d’autres atteintes,
Que son esprit entier se conservait à moi,
Et parmi ses rigueurs n’oubliait point sa foi.

Aronte.

À vous dire le vrai, j’en suis trompé moi-même.
Après deux ans passés dans un amour extrême,
Que sans occasion elle vînt à changer !
Je me fusse tenu coupable d’y songer ;
Mais puisque sans raison la volage vous change,
Faites qu’avec raison un changement vous venge.