Page:Corneille - Pulcherie, Luynes, 1673.djvu/45

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Ce titre est votre ouvrage, et vous me l'avez dit :
D'un service si grand votre espoir s'applaudit,
Et s'est fait en aveugle un obstacle invincible,
Quand il a cru se faire un succès infaillible.
Appuyé de mes soins, assuré de mon cœur,
Il fallait m'apporter la main d'un empereur,
M'élever jusqu'à vous en heureuse sujette :
Ma joie était entière, et ma gloire parfaite ;
Mais puis-je avec ce nom même chose pour vous ?
Il faut nommer un maître, et choisir un époux :
C'est la loi qu'on m'impose, ou plutôt c'est la peine
Qu'on attache aux douceurs de me voir souveraine.
Je sais que le sénat, d'une commune voix,
Me laisse avec respect la liberté du choix ;
Mais il attend de moi celui du plus grand homme
Qui respire aujourd'hui dans l'une et l'autre Rome :
Vous l'êtes, j'en suis sûre, et toutefois, hélas !
Un jour on le croira, mais...

'LÉON' — On ne le croit pas,
Madame : il faut encor du temps et des services ;
Il y faut du destin quelques heureux caprices,
Et que la renommée, instruite en ma faveur,
Séduisant l'univers, impose à ce grand cœur.
Cependant admirez comme un amant se flatte :
J'avais cru votre gloire un peu moins délicate ;
J'avais cru mieux répondre à ce que je vous dois
En tenant tout de vous, qu'en vous l'offrant en moi ;
Et qu'auprès d'un objet que l'amour sollicite,
Ce même amour pour moi tiendrait lieu de mérite.

'PULCHÉRIE' — Oui ; mais le tiendra-t-il auprès de l'univers,
Qui sur un si grand choix tient tous ses yeux ouverts ?
Peut-être le sénat n'ose encor vous élire,
Et si je m'y hasarde, osera m'en dédire ;
Peut-être