Page:Corneille - Pulcherie, Luynes, 1673.djvu/70

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La vôtre s'est usée à me favoriser :
Il faut encor plus faire, il faut...

'MARTIAN' — Quoi ?

'PULCHÉRIE' — M'épouser.

'MARTIAN' — Moi, madame ?

'PULCHÉRIE' — Oui, seigneur ; c'est le plus grand service
Que vos soins puissent rendre à votre impératrice.
Non qu'en m'offrant à vous je réponde à vos feux
Jusques à souhaiter des fils et des neveux :
Mon aïeul, dont partout les hauts faits retentissent,
Voudra bien qu'avec moi ses descendants finissent,
Que j'en sois la dernière, et ferme dignement
D'un si grand empereur l'auguste monument.
Qu'on ne prétende plus que ma gloire s'expose
À laisser des Césars du sang de Théodose.
Qu'ai-je affaire de race à me déshonorer,
Moi qui n'ai que trop vu ce sang dégénérer,
Et que s'il est fécond en illustres princesses,
Dans les princes qu'il forme il n'a que des faiblesses ?
Ce n'est pas que Léon, choisi pour souverain,
Pour me rendre à mon rang n'eût obtenu ma main.
Mon amour, à ce prix, se fût rendu justice ;
Mais puisqu'on m'a sans lui nommée impératrice,
je dois à ce haut rang d'assez nobles projets
Pour n'admettre en mon lit aucun de mes sujets.
Je ne veux plus d'époux, mais il m'en faut une ombre,
Qui des Césars pour moi puisse grossir le nombre ;
Un mari qui content d'être au-dessus des rois,
Me donne ses clartés, et dispense mes lois ;
Qui n'étant en effet que mon premier ministre,
Par ce que sous moi l'on craindrait de sinistre,