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118 LE CID

du roi ennemi lui fournit le prétexte d'encadrer quelques stances dans ses froids alexandrins :

Étrange arrêt des destinées I Les princes meurent comme nou».,. Si la mort abat les images. Elle en veut aux originaux.

��Les originaux, ce sont les dieux. Il faut avouer que dans cette pièce ils n'ont pas grand lieu d'être fiers de leurs « images » terrestres. La fille du roi se rend coupable de la plus lâche trahison : secondée par le piteux don Sanche, elle annonce que Rodrigue est mort, et frappe ainsi sa rivale au cœur : ^

Ceci la portera dedans le monument.

Son calcul odieux est déçu. Après avoir appelé la mort, après avoir exhorté ses soupirs « ainsi que des vipères » à la lui donner, Chimène se retrouve en face de Rodrigue bien vivant, et son émotion trahit son amour, et Rodrigue à son tour, « captif » de Chimène, manifeste toute l'ardeur de son « brasier », se lamente, se pâme presque avec elle :

Elvire, je suis mort, si ma Chimène est morte !

Telle fille, tel père : le roi n'est qu'un despote indolent, ca- pricieux et ingrat, qui se sert de Rodrigue et a peur de lui : « Son crédit m'épouvante ». Sa colère, quand il apprend l'a- mour de l'infante, est vraiment puérile, et les etiets en sont tout à fait incompréhensibles. En vain Rodrigue proteste de son innocence et de son désintéressement; il reçoit l'ordre de se déclarer à l'infante, et, quand il a obéi, la fureur du roi, témoin caché de cette épreuve bizarre, s'accroît encore! Arrêté, malgré les réclamations de don Diègue et de Chimène, le héros est jeté en prison. Chimène l'y suit : dans un duo trop apprêté pour être touchant, les deux amants s'y renvoient des couplets et des refrains symétriques :

RODRIGUE.

Le roi me fait captif, mais sache que mon âme Est plus captive que mon corps.

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