Aller au contenu

Page:Corneille Théâtre Hémon tome1.djvu/316

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
A MADAME DE COMBALET


Madame,

Ce portrait vivant que je vous offre représente un héros assez reconnaissable aux lauriers dont il est couvert. Sa vie a été une suite continuelle de victoires ; son corps, porté dans son armée, a gagné des batailles après sa mort; et son nom, au bout de six cents ans, vient encore triompher en France. Il y a trouvé une réception trop favorable pour se repentir d’être sorti de son pays, et d’avoir appris à parler une autre langue que la sienne. Ce succès à passé ^ mes plus ambitieuses espérances, et m’a surpris d’abord; mais il a cessé de m’étonner depuis que j’ai vu la satisfaction que vous avez témoignée quand il a paru devant vous. Alors j’ai osé me promettre de lui tout ce qui en est arrivé, et j’ai cru qu’après les éloges dont vous l’avez honoré, cet applaudissement universel ^ ne lui pouvait manquer. Et véritablement, Madame, on ne peut douter avec raison de ce que vaut une chose qui a le bonheur de vous plaire : le jugement que vous en faites est la marque assurée de son prix, et comme vous donnez toujours libéralement aux véritables beautés l’estime qu’elles méritent, les fausses n’ont jamais le pouvoir de vous éblouir.

1. Marie-Madeleine de Vignerot, veuve du marquis du Roure de Combalet, tué en 1621 devant Montauban, était fille de René de Vignerot, seigneur de Pont-Courley, et de Françoise du Plessis, soeur du cardinal. Son oncle lui fit obtenir la charge de dame d’honneur de la reine. Elle mourut en 1675. C’est en 1638 que Richelieu avait acheté pour elle le duché-pairie d’Aiguillon, créé en 1600 pour la famille de Lorraine-Mayenne. Dans les éditions de 1648-1650, cette épître dédicatoire est adressée : A Madame la duchesse d’Aiguillon.

S. Ce succès a passé. A dépassé.

Tout le bien qu’il en dit ne passe point l’estime. (Don Sanche, 1039.)

3. Applaudissement, au singulier, très usité au xviie siècle dans le sent d’approbation. Corneille dit de même, dans l’épitre dédicatoire de Rodogune ; « C’est à votre illustre suffrage qu’elle est obligée de tout ce qu’elle a reçu d'applaudissement. »