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Page:Corneille Théâtre Hémon tome1.djvu/51

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ÉTUDE D'ENSEMBLE xxxvii

les exemples, et au-dessus de toute imitation '. » Il sera beaucoup pardonné à l'abbé de Pure, parce qu'il a beaucoup admiré Corneille.

Ce que pensait l'abbé de Pure du théâtre de Corneille, ce qu'il lui écrivait (car nous avons des lettres de Corneille qui lui sont adressées) combien d'autres devaient le dire et l'écrire ! Racine, en effet, n'avait pas encore paru; Rotrou était mort et Corneille se taisait; mais on jouait toujours ses pièces et surtout— détail important qu'on n'a pas remarqué — on jouait celles de son frère Thomas. N'est-il pas de 1656, ce fameux Timocrate, dont les repré- sentations continuèrent tout un hiver avec un succès tel, que le roi alla le voir lui-même au Marais, et que les comédiens, fati- gués de faire salle comble tous les soirs, durent adresser au public ce compliment ingénu : « Messieurs, vous ne vous lassez point d'entendre Timocrate; pour nous, nous sommes las de le jouer. Nous courons risque d'oublier nos autres pièces; trouvez bon que nous ne la représentions plus. ., Est-ce que de telles victoires, dont l'écho retentissait au foyer même des deux frères, n'étaient pas faites pour réveiller le grand aîné et pour lui in- spirer une émulation généreuse?

Enfin, pourquoi ne pas s'en fier au témoignage de Corneille lui-même? Depuis quelques années, il avait lié connaissance avec Pellisson, et par lui avait été introduit dans la familiarité de Fouquet, ce protecteur généreux des lettres, qu'il éprouva si « libéral pour les muses ». C'est Fouq.iet, nous assure-t-il, qui lui fit « une pressante et douce violence ». On cite partout les beaux vers à Fouquet, préface naturelle d'Œdipe :

Je sens le même feu, je sens la même audace Qui fit plaindre le Cid, qui fit combattre Horace, Et je me trouve encor la main qui crayonna L'âme du grand Pompée et l'esprit de Cinna. Choisis-moi seulement quelque nom dans l'histoire Pour qui tu veuilles place au temple de la Gloire.

Fouquet, ou Pellisson pour lui, daigna choisir, comme nous l'apprend l'examen d'Œdipe : « La mauvaise fortune de Pertha- rite m'avait assez dégoûté du théâtre pour m'obliger à faire

1. La Prétieuse ou le Mystère des ruelles, 1636, t. I, p. 357.

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