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ACTE I, SCÈNE III Èi

Sous ces conditions est aussitôt jurée ;

Trois combattront pour tous ; mais, pour les mieux choisir, 325

Nos cliefs ont voulu prendre un peu plus de loisir;

Le vôtre est au sénat, le nôtre dans sa tente.

CAMILLE.

dieux, que ce discours rend mon âme contente!

CURL\CE.

Dans deux heures au plus, par un commun accord,

Le sort de- nos guerriers réglera notre sort. 330

Cependant tout est libre, attendant qu'on les nomme.

Rome est dans notre camp, et notre camp dans Rome.

D'un et d'autre côté l'accès étant permis,

Chacun va renouer avec ses vieux amis.

Pour moi, ma passion m'a fait suivre vos frères, 335

Et mes désirs ont eu des succès si prospères,

Que l'auteur de vos jours m'a promis à demain

Le bonheur sans pareil de vous donner la main.

Vous ne deviendrez pas rebelle à sa puissance?

CAMILLE.

Le devoir d'une fille est dans l'obéissance. 340

CL'RIACE.

Venez donc recevoir ce doux commandement Qui doit mettre le comble à mon contentement.

CAMILLE.

Je vais suivre vos pas, mais pour revoir mes frères,

325. Troit, sans substanKf, comme plus loin, dans le vers célèbre :

Que vouliez-vons qu'il fit contre trois ? (HI, 6.) 331. Tout est libre, espression un peu vaa;ue pour : toutes les communication» sont libres entre les deui peuples. — Attendant que semble d'abord une tournure peu correcte ; c'est au fond un latinisme, une sorte d'ablatif absolu, qui n'est point rare cbez Corneille :

Il satisfera, sire, et. vienne qui voudra.

Attendant qu'il lait su, voici qui répondra. (Cid, n, 7.)

333. D'un et d'autre côté, des deus côtés, de part et d'autre; en ces tournurea Corneille supprime très souvent l'article.

334. Renouer, absolument, refaire amitié. Bossuet a employé ce mot au figuré* « Cent fois on tente et cent fois on quitte, on rompt et on renoue bientôt avec le» plaisirs. (Sermon sur l'amour des plaisirs.)

337, A demain, pour demain.

338. Voltaire, qui critique l'expression sans pareil, observe pourtant qu'à l'époque de Corneille elle n'était point discréditée. C'est Boileau (Satire II) qui la ridiculisa plus tard. — Ici, comme au vers I tS2, donner la main signifie épouser, « Cette locution, dit M. Marty-I.aveaux, semble avoir été empruntée de l'espagnol darse las manos. » — « M. Corneille, dit Ménage, a introduit dans nos poèmes dra- matiques cette façon de parler, afin de diversifier, comme je lui ai ouï dire, les mots de mariage, de marier et d'épiuser, qui se rencontrent souvent dans ces sortes de poèmes et qui ne sont pas fort mbles, »

341, Ce vers et le précédent se retrouvent, non pas mot à mot, comme le dit Voltaire, mais à un mot près, dans le Menteur, acte V, se. 7.

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