Page:Corneille Théâtre Hémon tome2.djvu/140

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m HORACE

Mais, comme ii s'est vu seul contre trois adversaires,

Près d'être enfeimé d'eux, sa fuite Ta sauvé. 1005

LE VIEIL nOEACE.

Et nos soldats trahis ne l'ont point achevé !

Dans leurs rangs à ce lâche ils ont donné retraite !

JULIE.

Je n'ai rien voulu voir après cette défaite,

CAMILLE.

O mes frères!

LE VIEIL HORACE.

Tout beau, ne les pleurez pas tous : Deux jouissent d'un sort dont leur père est jaloux. lOIO Que des plus nobles fleurs leur tombe soit couverte; La gloire de leur mort m'a payé de leur perte: Ce bonheur a suivi leur courage invaincu, Qu'ils ont vu Rome libre autant qu'ils ont vécu,


1005. Près d'être enfermé d'eux, près d'être entouré, cerné par eux s

De ses mille soldats une troupe choisie Enferme la princesse. et sert sa jalousie. [Médée, 1014.) Le reste, impatient, dans sa noble colére. Enferme la victime. (Héraclius, V, 7.)

1009. Quoi qu'en dise Voltaire, cette expression familière peut être ennoblie par l'emploi qui en est fait :

Tout beau, ma passion, deviens un peu moins forte. {Cinna, 126.) Tout beau, Pauline, il entend vos paroles. [Polvoucte. 1215.) Tout beau, Flaminius, je n'y suis pas encore. (Nicomède. 1388,)

« Cette expression, fréquente dans Corneille, s'employait pour arrêter quel- qu'un, le retenir, le faire taire : « Et voulant interrompre lorsque M. Jaliot opinoit, Monsieur de Saint-Pol me fit signe de la main et me dit : Tout beau, ce qui me fit taire. » (Montluc, Commentaires, livre II.) Par malheur, les chasseurs se servent de cette locution en parlant aux chiens couchants, lorsqu'ils veulent les empêcher de pousser les perdrix qu'ils ont arrêtées ; cela a suffi pour la faire considérer comme triviale et déplacée dans le style élevé. » (Lexique de M. Marty-Laveaux.)

1011. M. Gidel rappelle ici les vers fameux de Virgile (Enéide, VI, 883):

Manibus date lilia pïcnis. Purpureos tpargam flores.

lOlJ. Dans les Commentaires sur le Cid, à propos du vers :

Ton bras est invaincu, mais nen pas invincible (418^

Voltaire (qui lui-même s'est servi de ce mot dans Olympie, I. 2) écrit : « On dit que invaincu est un barbarisme ; non, c'est un terme hasardé et nécessaire; » et dans les Commentaires sur Horace : « Ce mot invaincu n'a été employé que par Corneille, et devrait l'être, je crois, par tous nos poètes. Une ex- pression si bien mise ;\ sa place dans le Cid et dans cette admirable scène ne doit jamais vieillir. » Il a tort pourtant de croire que ce mot ait été créé par Corneille : nos anciens poètes, et en particulier Ronsard, l'avaient emplové déjà. C'est dans l'Ulusion comique (135) que Corneille en fait pour la première foia usage.

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