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Page:Corneille Théâtre Hémon tome2.djvu/162

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146 HORACE

Et recouvre là-bas tout ce qu elle a perdu

Cher époux, cher auteur du tourment qui me presse.

Ecoute ta pitié, si ta colère cesse;

Exerce l'une ou Fautre, après de tels malheurs, 1385

A punir ma faiblesse ou finir mes douleurs:

Je demande la mort pour grâce ou pour supplice:

Qu'elle soit un effet d'amour ou de justice,

N'importe : tous ses traits n'auront rien que de doux

Si je les Tois partir de la main d'un époux. 1390

HORACE.

Quelle injustice aux dieux d'abandonner aux femmes ^

Un empire si grand sur les plus belles âmes,

Et de se plaire à voir de si faibles vainqueurs

Régner si puissamment sur les plus nobles cœurs!

A quel pointma vertu devient-elle réduite ! 1395

Rien ne la saurait plus garantir que la fuite.

Adieu. Ne me suis point, ou retiens tes soupirs.

SABINE, seti/e. colère ! ô pitié ! sourdes à mes désirs,

��et l'on dit prétendre à, pour aspirer à. Mais le sens actif que Corneille donne à ce Terbe a quelque chose de plus énergique :

Comme le plus vaillant, je prétendsla troisième. (La Fontaine, Fablei,ï, 6.)

1383. Sur prewer, Yoyez la note du vers 1355.

1389, Var. îTimporlej tous ses traits me remlleront fort doux. (16*1 16*8.)

1395. « Devient réduite n'est pas français. Ce mot devenir ne convient jamais qu'aui afTections de l'âme; on devient faible, malheureux, hardi, timide, etc. ; on ne devient pas forcé à, réduit à. » (Voltaire.) — « Nous convenons que' le vers de Corneille n'est pas français; mais Voltaire se trompe lors(ju'il ajoute que le mot devenir ne convient qu'aux affections de l'âme; on devient vieux, aveugle, sourd, paralytique; on devient riche, pauvre, etc. » (Palissot. ) Nous irions plus loin que Palissot, et partagerions volontiers l'opinion de M. Littré, qui cite un exemple semblable de Corneille:

Les plus dignes soins d'one flamme si pnre Deviennent partagés à tonte la nature. (Pulchérie, 1, 1.)

« Voltaire, dit M. Littré, a condamné cet emploi du verbe devenir. Est-ce avet raison? La distinction entre l'adjectif et lo participe est si subtile, que cette con- damnation ne sera pas généralement admise. On dit très bien devenir enflé, dé- goûté, etc. Il ne faut donc pas contester à Corneille cet emploi qu'il fait de deve- nir.» Voyez le vers 1423.

1396. Evidemment, Corneille a voulu, en opposant cette scène inutile et froide à la scène des imprécations, nous attendrir après nous avoir frappés, et dimi- Doer l'horreur qu Horace nous inspire désormais, en faisant aussi large que possible chez ce fratricide la part des sentiments humains. Mais on ne peut s'empêcher de reconnaître qu'ici l'émotion d'Horace surprend beaucoup plus qu'au Beond acte, qu'elle est moins vraisemblable, après un tel acte de fureur, et, par mite, touche moiiu.

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