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Page:Corneille Théâtre Hémon tome2.djvu/192

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s CINNA

et un tabouret à la gauche du roi. » Voilà le décor prirtiitif qu'encadrait ce que d'Aubignac appelle « la toile peinte » de riiôtel de Bourgogne. Mais, que Beilerose ou Floridor y parût', on ne voyait plus qu'eux, et le cadi'e était oublié dès qu'avait retenti la voix de Cinna, d'Emilie ou d'Auguste. C'est ce que senl Corneille lorsque, souhaitant qu'on indique seulement le lieu général, il écrit : « Cela aiderait à tromper l'auditeur, qui ne voyant lien qui lui marquât la diversité dii-s lieux, ne s'en apercevrait pas, à moins d'une réilexion malicieuse et criti- que dont il y a peu qui soient capables, la plupart s'atta- chant avec chaleur à l'action qu'ils voient représenter 2. » Avec I;i même bonhomie, il fait justice de l'unité de temps, tout en constalanl que tous les événements de Cinna peuvent tenir en deux heures : « Je voudrais laisser celte durée à l'imagi- nation des spectateurs. »

De 1643 h 1648. Ci7ina eut six éditions; c'est assez dire quel 9n fut le succès. Si nous en croyons Fontenelle, les préféren- ces paternelles de Corneille hésitaient entre Cinna et Rodo- gune. Sans vouloir rabaisser Rodogune et son admirable cin- quième acte, il est permis de croire que l'hésitation n'était pas possible. Mais Corneille aimait à réunir les noms de ces chefs-d'œuvre inégaux. Dans des vers à Boisrobert, trop hum- bles pour être tout à fait sincères, il s'écrie :

Et pour uu seul endroit où lu me donnes place, Tu m'assures bien mieux de l'immortalité • Que Cinna, Rodogune, et le Cid, et YHorqce,

Longtemps après, quaud l'âge avait affaibli

la main qui rrayonna L'âme du grand Pompée et l'esprit de Cinna*, '•-■

1(1-. c; ^.WA. si le roi faisait représenter à 'Versailles les grandes œuvres du vieux poète (1676), et si celui-ci, réveillé dfins sa retraite un peu morose, faisait monter vers lui un cri de reconnaissance et d'espoir ingénu, c est encore Cinna qu'il citait au premier rang, non loin de Rodogune encore, mais auss:, il faut le dire, non loin de Surèna. Dans l'intervalle, sa foi en son œuvre avait traversé, sans faiblir, de pénibles épreuves. Dès 1643, une déception lui avait été sensible : on lui avait refusé le privilège qu'il sollicitait de faire jouer par qui bon lui sem-

1. Ils créèrent les premiers le rôle de Cinna, que tinrent ensuite Beanchà- teau et Baron. A Baron étaient associés Charnpmesie (Auguste) et m feoiniê (Emilie).

2. Disrours des trois nnitei. %. V( rs à Fouquet (1658),

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