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INTRODUCTION 43

mande ni la sympathie, ni l'admiration, n'est point de leur 'amille et doit prendre place bien loin d'eux. >> _

Comment donc ce personnage si peu fait pour l'admiration c-t-il pu devenir admirable? La postérité a-t-elle été désar- niée, ou plutôt dupée parles ruses du politique et les attitu- des étudiées du grand comédien? Oubliant qu'Auguste a été lo persécuteur de la liberté d'écrire, n'a-t-elle voulu voir en Ivi que le protecteur, un peu intéressé, des lettres et des arts? Soyons plus juste envers un homme dont le naturel semble avoir été particulièrement ondovant et divers. Dans cette peinture d'Octave qui se sent devenir Auguste, Corneille peint en raccourci deux phases très différentes d'une même histoire. L'unité de temps l'a contraint à brusquer plus d'une transition et à négliger plus d'une nuance; mais enfin ce caractère et cette époque ont présenté ce double aspect, et le drame n'est point si contraire à l'histoire.

A l'heure où Corneille l'a saisi, Auguste est à l'un de ces tournants de la vie d'où le passé, voilé d'un brouillard complai- sant, se distingue à peine. Comme le point de vue a changé, tout se transfigure ; le premier empereur romain ne voit plus les choses des mêmes yeux que le triumvir. Il a donc pu se tromper lui-même en trompant les autres. Qui serait assez habile , par exemple, pour faire la part de l'illusion et de la rouerie dans cette apologie personnelle connue sous le nom de Testament d'Auguste et que M. Georges Perrot a savamment restituée à Ancyre? C'est jusque-là qu'il faut remonter pour découvrir les origines de la légende impériale; et c'est l'empereur lui-même qui en jette les premiers fon- dements; c'est lui qui, déguisé, faxdé, méconnaissable, se présente à l'histoire étonnée. Lui, un usurpateur, un des- pote aux sanglants caprices! Qu'on le juge mal! Appelé par le vœu unanime de ses concitoyens, « per consensum universorum civium, » à éteindre les guerres civiles et à délivrer la république opprimée par une faction', légale- ment confirmé par le sénat dans le pouvoir qu'il a pris pour le bien de tous, il s'est borné à venger sur quelques scélérats le meurtre de son père, et a pardonné au plus grand nombre .

Ainsi Octave s'efface dans une pénombre discrète ; Auguste seul demeure en pleine lumière, et c'est Auguste seul que

1. o Ânoos undeviginti natus, esercitum privato consilio et privata inipensa comparavi, per quem rempublicam, doniinatione factionis oppressam, in liberta- Jem vindic.ivi... Respublica, ne quid accideret, a senatu mihi pro praetore simal cum consulibus tradita est tucnda... Qui parentem meum occiderunl eos in eisi- lium expuli, judiciis iegitimis ultus eorum scelus, et postea bellum inferentes rei- publicee Ticit acie vis... Victor omnibus superstitibus civibus peperci. •

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