Page:Corneille Théâtre Hémon tome2.djvu/273

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ACTE I, SCÈNE IV 89

Leur mémoire dans Rome est encor précieuse

Autant que de César la vie est odieuse; 270

Si leur vainqueur y règne, ils y sont regrettés,

Et par les vœux de tous leurs pareils souhaités.

Va marcher sur leurs pas où l'honneur te convie, Mais ne perds pas le soin de conserver ta vie. Souviens-toi du beau feu dont nous sommes épris, 275

Qu'aussi bien que la gloire ^Emilie est ton prix , Que tu me dois ton cœur, que mes faveurs t'attendent. Que tes jours me sont chers, que les miens en dépendent. Mais quelle occasion mène Evandre vers nous?

��SCÈNE IV CINNA, .EMILIE, ÉVANDRE, FULVIE.

ÉVANDRE.

Seigneur, César vous mande, et Maxime avec vous. 280

ClNNA.

Et Maxime avec moi? le sais-tu bien, Évandre?

270. Qui meurt par sa vertu, revit par sa mémoire. (Rofrou, Grisante, U, ii.;.

273. « Il faudrait : va, marche; on ne dit fias plus allons marcher qa allons aller. » (Voltaire). — « Ici encore, réyiond M. Warty-Laveaui, Voltaire s'attarhe trop à la signiQration primitive du verbe. Ne dit-on pas bien : je vais rourir, je ▼ais marcher et même je vais aller? Dans ces phrases, je vais n'est qu'un auxi- liaire destiné à marquer le futur. Dans notre exemple, va marcher équivaut à l'impératif marche; mais la tournure a plus de vivacité et d'énerpie.» — Convier à dans le sens d'inviter, engager, appeler à, n'a pas disparu, malgré les craintes de Voltaire; mais convier de, qu'on trouve au V..1701, est plus rare.

276. Remarquez cette tournure qui serait peu correcte aujourd'hui : souviens- toi de... et que. On trouve dans le théâtre de Corneille plus d'un exemple d'un même verbe ayant des régimes de nature différente :

Je le sais, ma princesse, el «luil vons fait la conr. (Nicomède, 18.)

77. « Ailleurs ce mot de faveurs exciterait la risée et le murmure; mais ce mot est ici confondu dans la foule des beautés de cette scène, si vive, si élo- quente et si romaine. » (Voltaire.) Cela est vrai; le mot n'en choque pas moins la délicatesse moderne. On a besoin, pour l'excuser, de se rappeler le singulier mélange de galanterie et de politique qui distingue les intrigues contemporai- nes de Corneille.

279. Mène; nous dirions plutôt : amène.

280. « L'intrigue est nouée dès le premier acte; le plus grand intérêt et le plus grand péril s'y manifestent; c'est un coup de théâtre. » (Voltaire.) Cor- neille lui-même a pris soin de l'aire remarquer comment la consultation ainsi annoncée relie les deux premiers actes : « On n'en sait pas la cause, mais en- fin Auguste les mande, et cela suffit pour faire une sur[irise très agréable de le voir délibérer s'il quittera l'empire ou non avec deux hommes qui ont conspiré centre lui. Cette surprise aurait perdu la moitié de ses grâces s'il ne les eût point mandés dès le premier acte ou si on n'y eût point connu Maxime pour un dei rhefs de ce grand dessein. » fDiscours du ztoéme dramatique.)

�� �