ACTE IV, SCÈNE V 155
Cesse de fuir en lâcltc un glorieux trépas, i3îi."i
Ou de m'offrir un cu'.ir (jue tu fais voir si bas;
Fais que je porte envie à ta vertu parfaite;
Ne te pouvant aimer, fais que je te regrette;
Montre d'un vrai Romain la dernière vigueur,
l'.L mérite mes pleurs au défaut de mon cœur. 1360
Quoi! si ton amitié pour Cinna s'intéresse,
Crois-tu qu'elle consiste à tlatter sa maîtresse?
Apprends, apprends de moi quel en est le devoir,
Et donne-m'en l'exemple, ou viens le recevoir.
MAXIME.
Votre juste douleur est trop impétueuse. 1365
jEhiïuv:. La tienne en ta faveur est trop iiiirénieuse. Tu me parles déjà d'un bienheur. ax retour, Et dans tes déplaisirs tu conçois de l'amour 1
MAXIME.
Cet amour en naissant est toutefois extrême.
C'est votre amant en vous, c'est mon ami que j'aime, 1370
Et des mêmes ardeurs dont il fut embrasé...
jEMILIE.
Maxime, en voilà trop pour un homme avisé.
Ma perte m'a surprise, et ne m'a point troublée;
Mon noble désespoir ne m'a point aveuglée;
Ma vertu tout entière agit sans s'émouvoir, 1375
Et je vois malgré moi plus que je ne veux voir.
MAXIME.
Quoi! TOUS suis-je suspect de quelque perfidie?
jEMILIE.
Oui, tu l'es, puisque enfin tu veux que je le die. L'ordre de notre fuite est trop bien concerté
1356. Les héroïnes rornéliennes ont besoin d'admirer pour aimer. 1358. Anacoluthe : Si je ne puis t'aimer, du moins
1360. Au défaut de ton bras, prête-moi ton épée. {Phèdre, II, v.)
Au défaut de et à défaut de s'employaient au temps de Corneille, bien que la première de ces locutions fût plus usitée. M. Littré repousse d'ailleurs la dis- tinction de sens que les grammairiens ont prétendu établir enire elles.
13fil. Sur la tournure s'intcrrsse7' pour, voyez la note du v. 1174.
1368. DéplaUirs, dans un sens très fort, comme au v. 1194.
1371 Embrasé, romme brasier, flamme, feux, métaphores analogues, appar- tient au langage convenu de la galanterie au xvn' siècle. « Mon cœur est em- brasé D'une indigne ardeur lâchement embrasé. " (Cid, 120; Nicomède, 1485.)
1372. M Avisé n'est pas ie mot propre ; il semble qu'au contraire Maiime a été trop peu avisé ; il parait trop évidemment perfide ; Emilie l'a déjà appelé lâche.» (\'oltaireJ
1378. Sur die, voyez la note du v. 61.
1379. Ici encore, ordre a le sens àcjplan.
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