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12 POLYEUCTE

nias de Tyane et Orphée. Qu'importait un dieu déplus ou de

moins dans ce Panthéon si hospitalier, déjà envahi par les diviniLés bizarres de l'Orient? Mais la seule pensée d'une telle promisciiiLé indignait les chrétiens : à toutes ces avances, ils répondaient, comme répond Polyeucte :

Je n'adore^ qu'un Dieu, maître de l'univers*.

Voilà où était l'impiété, voilà oil était le crime d'État, voilà ce qui fit d'un Trajan et d'un Marc-Aurèle des persécuteurs.

��II

LA TRAGÉDIE CHRÉTIENNE

D'après une tradition généralement suivie, Corneille avait lu Po/(/euc/e à l'hôtel de Rambouillet. « La pièce fut applaudie autant que le demandaient la bienséance et la grande répu- tation que l'auteur avait déjà; mais, quelques jours après, M. de Voiture 2 vint trouver M. Corneille et prit des tours fort délicats pour lui dire que Polyeucle n'avait pas réussi comme il pensait, que surtout le christianisme avait extrêmement déplu ^. »

Comment le christianisme avait-il pu si fort déplaire à l'hô- tel de Rambouillet, où les incrédules, les « liberlins », comme on disait alors, ne dominaient pas assurément? Les frères Parfaict assurent, il est vrai, que Polyeucte réunit les suf- frages des personnes pieuses et des connaisseurs*; mais lui- même, d'accord avec Tabbé d Âubignac, se charge de nous prouver que certaines « personnes pieuses » étaient alarmées des hardiesses cornéliennes. La sévère orthodoxie de quelques- uns était offensée de voir mêler la galanterie à la sainteté d'un sujet chrétien et d'entendre Stratonice proférer une infinité d'injures atroces contre le christianisme. « Cela fit un si mauvais effet que feu M. le cardinal de Richelieu ne le put jamais approuver. >> Comme si Corneille devait être endu responsable des invectives que, trop fidèle à l'exacti- tude historique, il met dans la bouche d'une païenne aveu-

��1. Polyeucte, V, 3.

2. Suivant d'autres récits, l'ambassadeur do l'hôtel ds Rambouillet fut Godeao, U futur évêque de Grasse et de Vence.

3. Fontenelle, Vie de Corneille.

4. Histoire du théâtre français, VI.

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