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ÉPITRE A RlCttELlEU 61

de sa préSf^nce et de son attention le récit de nos poèmes. C'est là que, lisant sur son visage ce qui lui pl.iil et ce qui ne lui plait pas, nous nous instruisons avec cerlitade de ce qui est bon et de ce qui est mauvais, et tirons des règles infailli- bles de ce qu'il Tant suivre et de ce qu"il faut éviter ; c'est \k que j'ai souvent nppris en deux heures ce que mes livres n'eussent pu m'apprendre en dix ans ; c'est là que j'ai puisé ce qui m'a valu l'applaudissement du public ; et c'est là qu'avec votre faveur j'espère puiser assez pour être un jour une œuvre digne de vos mains. IVe trouvez donc pas mauvais, Monseig'neur, que, pour vous remercier de ce que j'ai de réputation, dont je vous suis entièrement redevable, l'emprunte quatre vers d'un autre Horace' que celui que je vous présente, et que je vous exprime par eux les plus véri- tables sentiments de mon âme :

« Totum muneris hoc lui est, Quod monstror digito prœtereuntium

Scenae non levis arlifex : Quod spiro et placée, si placeo, tuum est. »

Je n'ajouterai qu'une vérité à celle-ci en vous suppliant de croire que je suis et serai toute ma vie très passionnément*, Monseigneur,

De Votre Eminence,

Le très humble, très obéissant et très fidèle serviteur.

Corneille.

��1. Jeu de mots puéril, qui rapproche le meurtrier de Camillo et le favori de Mécène. Coi'neille, d'ailleurs, accommode la citation d'Horace de manière à pouvoir se l'appliquer : il y a dans l'ode HI du IV' livre, non pas scenx non

evis artifcx, mais rnmanx fi'Ucen lyrx.

2. Coriieille a eu le torl grave de prendre plus tard (Sonnet sur la mort de Louis XUl, 1643) sa revanche des flatteries obligées qu'il adresse ici au « tyran ». Mais c'est par là seulement qu'il est coupable, non par la prodigalité des flat- teries dont les auteurs d'cpitres dédicatoircs étaient outumiers. Voyez, d%Qg Botre édition de Cinna, la notice sur l'Épitre à M. de Montoron.

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