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U ÉTUDE

III

LA COMÉDIE HÉROÏQUE

Acte I. — Le drame s'ouvre par un entretien de D. Léonor, reine d'Aragon (exilée de ses États par le triomphe de l'usurpateur D. Garde), et de sa fille D. Elvire. Celle-ci est aimée du comte Alvar de Lune, mais répond froidement à sa passion. N'aime- rait-elle pas en secret Carlos, le brillant aventurier qui commande les armées d'Aragon? Sa mère l'insinue et s'en étonne : ce sang « que le Ciel n'a formé que de boue » est indigne de s'allier au sang royal. Elvire le sait ; elle estime, elle admire Carlos, mais elle n'oublie pas le devoir que lui impose sa naissance :

Il a trop de vertus pour être téméraire ;

Et si jamais ses vœux s'échappaient jusqu'à moi, •■

Je sais ce que je suis, et ce que je me doi.

Qui sait pourtant si ce héros inconnu est si indigne d'elle ? Eu vraie Espagnole, en princesse de roman, elle rêve déjà tout un mystère, et, comme Don Sanche est un roman porté au théâtre, son rêve, au dénouement, se trouvera réalisé.

Sa naissance inconnue est peut-être sans tache :

Vous la présumez basse à cause qu'il la cache;

Mais combien a-t-on vu de princes déguisés

Signaler leur vertu sous des noms supposés,

Dompter des nations, gagner des diadèmes.

Sans qu'aucun les connût, sans se connaître eux-mêmes!

Nous voilà prévenus, et nous comprenons à demi-mot : c'est à une tragi-comédie que nous allons assister. Le cadre de ce pre- mier acte ne manque pas de grandeur : c'est ce jour-là que la reine Isabelle doit se prononcer entre les prétendants. Avant d'ouvrir le conseil, elle se lamente d'être obligée de se sacrifier au repos de l'État :

D. ISABELLE.

Que c'est un sort fâcheux et triste que le nôtre,

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