Page:Corneille Théâtre Hémon tome4.djvu/19

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SUR THEODORE 7

iiiartyre, qu'ea sou griiéreux égoismo il veut se réserver saus partage. Cette émulatiou daus l'héroïsme, admirable au point de vue chrétien, ne produit qu'un médiocre effet dramatique : nous avons quitté la terre et nous touchons aux régions de la sainteté pure, où toute imperIVctiou, mais aussi où toute émotion humaiuc s'évanouit. Le poignard de Marcelle, q\ii les réunit avec justice daus la mort, les frappe sur le seuil même de la iii'atitude. Ils ne sont plus des nôtres.

Voilà pourquoi le christianisme a déplu, dans Thiiodore, nuu plus aux seuls habitués de Thùtel de Rambouillet, mais à tout le public. Voilà pourquoi Corneille lui-même, s'il parle peu de Di- dyme. s'il loue le caractère vigoureux et auimé de Placide, sans tenir compte de la situation fausse qui le paralyse, condamne très nettement le caractère de Théodore : « Celui de Théodore est entièrement froid : elle n'a aucune passion qui l'agite ; et là même où son zèle pour Dieu, qui occupe toute son àme, devrait éclater le plus, c'est-à-dire dans sa contestation avec Didyme pour le mar- tyre, je lui ai donné si peu de chaleur que cette scène, bien que très courte, ne laisse pas d'ennuyer. Aussi, pour eu parler saine- ment, une vierge et martyre sur un théâtre n'est autre chose qu'un Terme qui n'a nijambesuibras, et par conséquent point d'action '. » Comment être plus sévère que Corneille envers Corneille ?

Polyeucte. Pauline, Sévère même, sont bien loin ; mais il y a un Félix dans Théodore, et le gouverneur d'Antioche est bien proche parent du gouverneur d'Arménie. C'est Corneille encore qui le remarque, et devance la critique : « Le caractère de Valens res- semble trop à celui de Félix dans Polyeucte, et a même quelque chose de plus bas, en ce qu'il se ravalé à craindre sa femme et n'ose s'opposer à ses fureurs, bien que dans l'ànie il tienne le parti de son fils. Tout gouverneur qu'il est, il demeure les bras croisés, au cinquième acte, quand il les voit prêts à s'entr'immoler l'un à l'autre, et attend le succès de leur haine mutuelle pour se ranger du côté du plus fort. La connaissance que Placide, son fils, a de cette bassesse d'âme, fait qu'il le regarde si bien comme un es- clave de Marcelle, qu'il ne daigne s'adresser à lui pour obtenir ce qu'il suuiuiite eu faveur de sa maîtresse, sachant bien qu'il le ferait inutilement. 11 aime mieux se jeter aux pieds de cette ma- râtre impérieuse, qu'il hait et qu'il a bravée, que de perdre des

1. Examen de Théodore.

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