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Page:Corneille Théâtre Hémon tome4.djvu/199

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INTRODUCTION 187

par de jeunes comédions ». S"il avait borné là son ambilion, son étude serait plus utile et plus brève. .Vais le comédien s"esl fait critique. A l'excmide de Voltaire, il condamne de haut tous les idiolismes de la langue cornélienne, mal com- prise; il élimine avec un soin scrupuleux toules les façons de parler qui lui semblent trop voisines de la comédie, comme si l'origirialilé de la pièce ne consistait pas en cela même. Quand Une mutile pas le texte, il lalTadit. Il est le premier sans doute à confesser la platitude de certaines corrections, mais il les basarde pourtant, dans rinlérèt sacré de la gram- maire, que Corneille, parait-il, avait foit maltraitée. Par une singulière inconséquence, ce même acteur qui, bravant l'auto- rité de M. de Duras, gentilhomme de la Chambre, r-lablissait à la scène le texte du Vcnceslas de Hotrou « rajeuni » ]>ar Mar- montel, prenait avec le te.xte de Corneille d'étranges libertés, tout en protestant de son respect pour le vieux tragique. C'est cette inconséquence que lui reprochait avec raison Mole, son successeur, qui ne le fd pas oublier : car, jusqu'à la mort de Lekain (1778), il n'avait joué que des rôles de comédie, où sa parole, tantôt hésitante ou bégayante, tantôttrop rapide, plai- sait par ses défauts mêmes. I^ui aussi, Lekain, avait à surmon- ter de graves défauts naturels : il n'avait ni la prestance de Ui taille ni la sonorité de la voix. A force d'intelligence, il triom- pha de tous ces obstacles. Pourquoi faut-il qu'à celte victoire remportée sur lui-nnmeil en ait voulu joindre une autre rem- portée sur Corneille? Dans cette lutte inégale il devait être vaincu. Nous donnons pourtant la plupart de ses remarques et des corrections proposées par lui, ne fût-ce que pour faire toucher du doigt la diflérence qui sépare l'esprit du génie. L'excuse de Lekain, c'est qu'il ne sentait point et qu'on ne sentait point autour de lui la ridicule inconvenance de ces tentatives. C'est un an après sa mort que Tronchin commen- çai! la publication de l'ouvrage en cinq volumes qu'il intitule si étrangement Mes récréatiom dramatiques '. Dix pièces ds Corneille y sont raccourcies de prés de cinq mille vers; quant aux vers retouchés ou changés, ils sont innombrables. Parfois c'est à peine si quelques centaines de vers originaux sont épargnés. Le profanateur n'en ose pas moins aflirmer qu'il a essayé de laisser intact « tout ce qui constituait le génie du poêle )'. On voit, en lisant sa Préface, qu'il a conscience d'ac- complir une œuvre utile à son siècle : « L'essai que j'otl're à

i. (ienève. Bonnant, 1779-1784, 3 vol. in-S". Tronrhin y donne ses propres œuvres tragi.^iies : Marie Stuart, les Commènes, TcreiUia, la Princesse de Portugal, L'iiiis I", prince de Condé; Cornélie, mère des Grncqiie<; Coriolan, Tii^entia, les Deux Andronics. Il corrige aussi le Scévole de du Ryer et le Yenceslas de Rotrou.

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