Aller au contenu

Page:Corneille Théâtre Hémon tome4.djvu/26

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

14 l'iTUUE

le jugement peu suspect de Fouteaelle : » lléracUus est ù. l'e^pa- {Tuole, trop intrigué, trop embarrassé, fatigant. » Fonteuelle se souvenait sans doute des vers de Boileau :

Je nie ris d'un auteur qui, lent h. s'exprimer, ])o Cl' (|u"il vent d'abord ne sait pas nriuformer. Et qui. ili'hniuillant mal une pénible intrigue. D'un diviTti^semeut ine t'ait une fatigue '.

Mais Boileau lui-même devait se souvenir des aveux naïvement sincères de Corneille. Le grand poète ingénu constate, dans son Examen, que «cette tragédie a encore plus d'effort d'invention que celle de Rodogiine »'; il regrette de n'avoir pas eu « assez d'adresse» pour faire comprendre au public, dès le premier acte, certaines équivoques ingénieuses d'Héraclius, à qui le secret de sa nais- sance, ignoré de la plupart des alitres personnages, est déjà ré- vélé : car, observe-t-il, « on ne les peut comprendre que par une réflexion après que la pièce est finie, et qu'il est entièrement re- connu, ou dans une seconde représentation ». Plus loin , il insiste sur cette nécessité d'une seconde représentation pour bien en- tendre Héraclius : « Le poème est si embarrassé qu'il demande une merveilleuse attention. J'ai vu de fort bons esprits, et des per- sonnes des plus qualifiées de la cour, se plaindre de ce que sa re- présentation fatiguait autant l'esprit qu'une étude sérieuse. Elle n'a pas laissé de plaire; mais /e crois qu'il l'a fallu voir plus d'une fois pour en remporter une entière intelligence ~. » Boileau n'était pas encore, mais sera bientôt de ces bons esprits-là.

Avec une égale fi'auchise, Corneille confesse qu'il a fait <■ une pièce d'invention sous des noms véritables ». Il va plus loin; il recon- naît que ce drame inventé de toutes pièces n'est pas toujours fort vraisemblable, et il fait presque de l'invraisemblance une loi du drame : » Quoique peut-être on voudra prendre cette proposition pour un paradoxe, je ne craindrai point d'avancer que le sujet d'une belle tragédie doit n'être pas vraiseviblable. » En tout cas, il montre un profond dédain pour la vérité historique. 11 faut citer

1. Art poétique, III.

2. Examen d'Héraclius. Dans le Biscows des trois unités. Corneille dit de même : « Il y a des intrigues qui commencent dès la naissance du héros, comme celle d'Héraclius; mais ces grands efforts d'imagination en doriiundent un extraor- dinaire à l'attention du spectateur, et l'empêchent souvent de prendre un plaisir entier aux premières représentations, tant ils le fatiguent. »

�� �