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292 NICOMÈDE

Il rendra quelque calme à son cœur magnanime, Et lui pourra sans doute épargner plus d'un crime.

Je ne demande point que par compassion Vous assuriez un sceptre à ma protection, N'i que, pour garantir la personne d"Attale, 1275

Vous partagiez entre eux la puissance loyale : Si vos amis de Rome en ont pris quelque soin, C'était sans mon aveu, je n'en ai pas besoin. Je n'aime point si mal que de ne pas vous suivre, Sitôt qu'entre mes bras vous cesserez de vivre, 1280

Et sur votre tombeau mes premières douleurs Verseront tout ensemble et mon sang et mes pleurs.

PRUSIAS.

Ah! Madame!

ARSINOÉ.

Oui, Seigneur, cette heure infortunée Par vos derniers soupirs clora ma destinée, Et puisque ainsi jamais il ne sera mon roi, 1285

Qu'ai-je à craindre de lui? Que peut-il contre moi? Tout ce que je demande en faveur de ce gage, De ce fils qui déjà lui donne tant d'ombrage,

��même parfois éloigner un lieu, pour le quitter. — Remettra, calmera ; on disait un esprit remis, un visage, un parler remis, dans le sens du latin remit 1ère, re- missus.

1274. A ma protection, pour ma protection, pour me protéger. Ce sens est précisé dans le vers suivant, pour garantir la personne d'AttaJe.

1277. Démasquée par ÎSiconiède, c'est pour Prusias seul qu'Arsinoé joue la comédie du desintéressement, c'est Prusias qu'elle cherche à attendrir en l'alarmant pour elle et pour son fils. On ne conçoit pas que Voltaire ait critiqué la fausseté de ces sentiments : si Arsinoé n'était pas fausse, elle ne serait plus Arsinoé.

1270. Je n'aime p'jint si mal que... assez mal pour ne pas vous suivre. Ce tour n'est nullement incorrect, et l'on en trouve plusieurs exemples chez Cor- neille.

IJSi. u Suivant Voltaire, clore, clos, n'est absolument point d'us:igc d.ins le style tragique. Pourquoi? ce mot ii'est-il pas clair, imagé, harmonieux ? ijue faut-il de plus pour la dignité tragique? » (M. Ciodefroy.) — Il est impossible de ne pas se rappeler ici une scéiie célèbre du Malade imaginaire, et difficile de ne pas croire que Molière lui-même s'est souvenu de Corneille: « Béiixe. Mon Dieu! il ne faut point vous tourmenter de tout cela. S'il vient faute île vous, mon fils, je ne veux plus rester au monde. — Ahgan. M'amie! — Bkline. Oui, mon ami. si je suis assez malheureuse pour vous perdre... — Argan. Ma chère femme! — Bé- L'.NE. La vie ne me sera plus de rien. — Argan. Mamour! — Béline. Et je suivrai vos pas pour vous faire connaître la tendresse que j'ai pour vous. — Argan. M'amie, vous me fendez le cœur ! »

1287. De ce gage, d'Atlale; c'est le latin pignus. Mais ce mot est employé ici absolument, tandis qu'en général les poètes écrivent : ce gage de mon amour, ce gage de sa flamme. (Racine, Andromaque, III, 8.)

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