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SUR TITE ET BÉRÉNICE bol

chef-d'œuvre de l'art » du grand Corneille, furent inutiles, et Ti(e et Bérénice n'a jamais reparu sur la scène française, tandis que la Bérénice rivale a fait couler encore bien des larmes. Fonteuelle assure, il est vrai, que si Racine fut vainqueur, c'est que ses ac- teurs s'appelaient Floridor et la Champmeslé; mais ceux de Cor- neille étaient Barou, la Thorillière, M'i^s Molière, Beauval, de Brio. La troupe de Molière était-elle donc si inférieure à celle de l'Hôtel de Bourgogne? Corneille semLlait le croire et le dire, lui qui rêvait d'un temps plus heureux où « Bérénice eufin trouverait des ac- teurs* ». 11 ne voulait pas s'avouer que Tite et Domitian étaient '*s grands coupables.

Toutefois le triomphe de Racine ne fut pas sans quelque mélange d'amertume. Eu ce temps où sa gloire n'était pas encore déhniti- vemeut établie, la représentation de chaque nouvelle pièce était une bataille, où tous, amis et euueuiis, preiiaieut part. Assez rai'cs étaient les inditféreuts, comme Guy-Patin, qui, annonçant les Bé- rénices à un ami, se contentait d'éci'ire, sans donner un seul nom propre : « Deux divers poètes y ont travaillé. >■ Mais les partisans fidèles du vieux Corneille trouvaient « fort plaisante et fort spiri- tuelle,... sauf quelques mots qui ne valent rien du tout- », la Critique de Bérénice, médiocre pamphlet en deux parties, dont Fauteur était l'abbé Montfaucon de Villars, abbé mondain, neveu du célèbre bénédictin, mais interdit après la publication d'un l'oman étrange 3. U est vrai que Corueille, épargné dans la première partie, ne le fut pas dans la seconde. Mais nous ne nous arrête- rons pas à ce factum, pas plus qu'à une autre critique sous forme de comédie eu trois actes, en prose, Tile et Titus, ou les Bérénices. Ou y voit Tite et Titus, qui s'accusent l'un l'autre d'imposture, com- paraître devant le tribunal d'Apollon, dont le jugement, rendu après de longs débats, est plutôt favorable à Racine, et conclut toutefois que « les uns et les autres auraient bien mieux fait de se tenir au pays d'Histoire, dont ils sont originaires, que d'avoir voulu passer dans l'empire de Poésie, à quoi ils n'étaient nullement propres ». Les termes de cet arrêt sont trop rigoureux; mais ne

i. Au Roi (1676).

2. Lettre de M"» de Sévigné à M"« de Grignan, 16 septembre 1671.

3. M. Deltour, les Ennemis de Racine.

4. Utrecht, 1673, in-12, chez Jean Ribblns. On trouvera IVnalyse de cette co- niérlie dans VHistnire du théâtre français des frères Parfaict et dans l'éditioa de Racine par M. Bernardin, t. II, Notice de Bérénice.

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