Page:Corneille Théâtre Hémon tome4.djvu/571

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SUR PSYCHÉ Bjid

Tout ce que j'ai senti n'agissait point de même,

Et je dirais que je vous aimn, Seigneur, si je savais ce que c'est que d'aimer. Ne les détournez point, ces yeux qui m'empoisonnent. Ces yeux tendres, ces yeux perçants, mais amoureux, Qui semblent partager le trouble qu'ils me donnent.

Hélas! plus ils sont dangereux, Plus je me plais à m'attacher sur eux. Par quel ordre du Ciel, que je ne puis comprendre,

Vous dis-je plus que je ne dois, Moi, de qui la pudeur devrait du moins attendre Que vous m'expliquassiez le trouble où je vous vois? Vous soupirez, Seigneur, ainsi que je soupire : Vos sens, comme les miens, paraissent interdits. C'est à moi de m'en taire, à vous de mp le dire : Et cependant c'est moi qui vous le dis.

"Comme c'est bien là, dit M. Saint-Marc-Girardiu', l'expression de l'amour ingénu, de cet amour qui ne semble pas convenir au théâtre, tant il est aimable et facile, tant il est sans détours et sans replis, et que Corneille pourtant a su peindre avec des traits aussi vifs et aussi intéressants que l'amour plein de sci'upules et de lut- tes de Chimène et de Pauline! » Ce qui n'est pas moins charmant peut-être, c'est qu'au milieu de ces troubles du cœur et de ces éblouissements des yeux, Psyché reste ce qu'elle était, bonne, simple, tendre, plus préoccupée des autres que d'elle-même. Elle songe à son père; elle demande que ses sœurs puissent être les té- moins de sa gloire et de son bonheur. L'Amour s'en montre blessé; la jalousie suit de bien près la tendresse.

��Vous ne me donnez pas, Psyché, toute votre âme : Ce tendre souvenir d'un père et de deux sœurs

Me vole une part des douceurs

Que je veux toutes pour ma flamme. N'ayez d'j'eux que pour moi, qui n'en ai que pour vous! Ne songez qu'à m'aimer, ne songez qu'à me plaire, Et quand de tels soucis osent vous en distraire...

��Des tendresses du sang peut-on être jaloux?

l'amour. Je le suis, ma Psyché, de toute la nature :

1. Cours de iittcratiire dramatique, IV, 51.

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