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NAUFRAGE DE LA MÉDUSE.

ment était tel, que quelques infortunés furent étouffés par le poids de leurs camarades qui tombaient sur eux à chaque instant. Les officiers se tenaient au pied du petit mat, obligés à chaque instant, pour éviter la vague, de crier à ceux qui les environnaient de passer sur l’un ou l’autre bord ; car la lame, qui nous venait à-peu-près du travers, donnait à notre radeau une position presque perpendiculaire, en sorte que, pour faire contre-poids, on était obligé de se précipiter sur le côté soulevé par la mer.

Les soldats et matelots, effrayés par la présence d’un danger presqu’inévitable, ne doutèrent plus qu’ils ne fussent tous arrivés à leur dernière heure.


    dans ces profondeurs, ou bien la mer, agitée dans ces parages plus profondément qu’on ne le suppose, leur faisait-elle craindre, dans cette situation, d’être jetés à la côte ? Quoi qu’il en soit, l’ordre de leur marche, leur disposition par rapport à la force qui les poussait et à laquelle ils cherchaient à résister, la raideur apparente de leur voile ou crête, paraissaient aussi admirables que surprenans. Le même M. Rang, dont on a fait un bel éloge dans cet ouvrage, ayant eu la curiosité de saisir un de ces singuliers animaux, ne tarda pas à ressentir à la main des picottemens et une chaleur brûlante qui le firent souffrir jusqu’au lendemain. Des os de sèche gigantesque, déjà blanchis par le soleil, passaient rapidement le long du bord et presque toujours avec quelques insectes qui, s’étant imprudemment trop éloignés de la terre, pour ne pas être submergés, s’étaient réfugiés sur ces îles flottantes. Dès que la mer se fut calmée, on commença à apercevoir quelques grands pélicans se balançant mollement sur les flots.