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NAUFRAGE DE LA MÉDUSE.

pas : nos conducteurs vont au-devant à moitié chemin. Ils laissent un seul homme et se retirent : les Maures en font autant de leur côté. Les deux parlementaires s’entretiennent pendant quelque temps ; puis ils reviennent chacun à leur troupe. L’explication fut satisfaisante, et les Maures ne tardent pas à venir nous trouver sans la moindre défiance.

« Leurs femmes nous apportent du lait, qu’elles nous vendent horriblement cher ; la rapacité de ces Maures est étonnante ; ils demandent jusqu’à partager le lait qu’ils nous ont vendu.

« Cependant nous vîmes une voile qui cinglait vers nous ; nous fîmes toutes sortes de signaux pour en être aperçus, et nous fûmes assurés qu’on nous répondait. Notre joie fut vive et bien fondée ; c’était le brick l’Argus qui venait à notre secours. Il baisse les voiles et met une embarcation à la mer. Quand elle est auprès des brisans, un de nos Maures se jette à la nage, muni d’un billet qui peignait notre détresse. Le canot prend le Maure à bord, et retourne porter le billet au capitaine. Après une demi-heure, le canot revient chargé d’un gros baril et de deux petits… Lorsqu’il est arrivé à l’endroit où il avait pris le Maure, ce dernier se remet à la nage, apportant avec lui la réponse, elle nous annonce qu’on va mettre à la mer un tonneau de biscuit et de fromage, et deux autres contenant du vin et de l’eau-de-vie.

« Une autre nouvelle nous comble de joie : les deux embarcations, qui n’étaient pas échoués comme nous