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NAUFRAGE DE LA MÉDUSE.

de nerfs : à cela se joignait la crainte que le traité ne fût connu de ses compatriotes, et c’est ce qui le porta à cet acte de désespoir qui faillit lui coûter la vie, et priver l’humanité d’un des plus zélés partisans de la liberté et de l’abolition de la traite des noirs.

Le 19 au matin, ils arrivèrent dans un village situé sur les bords de l’un des bras du Sénégal, qu’on nomme Marigot des Maringouins, et qui parait être l’ancienne bouche du fleuve, lorsqu’il se rendait directement à la mer avant qu’il se fût détourné pour se porter vers le sud. Cet emplacement peut acquérir un jour de l’importance, si la Sénégambie vient enfin à se coloniser.

En effet, nos compagnons remarquèrent que les bords de ce bras du fleuve sont très-bien cultivés. La campagne est couverte de plantations de cotonniers, de champs de maïs et de mil[1] : on y rencontre par-

  1. Est-ce bien du maïs (zea) que l’on a remarqué vers ce marigot et par grandes plantations ? Ce nom est si souvent donné aux variétés du sorgho et du dourha des noirs, qu’il est vraisemblable qu’on s’est trompé. On a déjà imprimé, depuis cette expédition, que le maïs était cultivé en plein champ par les noirs du Cap-Vert, tandis que leur culture en graines se borne à deux espèces de boulques, auxquelles ils ajoutent çà et là, mais en champ moins étendu, une espèce de haricot, le dolique unguiculé, qu’ils recueillent en octobre, et dont ils vendent une partie à Gorée et à Saint-Louis, soit en gousses, soit en semences. Les mets qu’ils préparent avec ce dolique sont assaisonnés de feuilles de boabab mises en poudre, et de casse à feuilles obtuses et encore fraîches. Quant aux cous-