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Page:Corréard, Savigny - Naufrage de la frégate La Méduse, 1821.djvu/373

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NAUFRAGE DE LA MÉDUSE.

sances, par les calculs et l’intérêt de quelqu’autrc qui ne souffrira point qu’elle soit rétablie ; mais elle l’est encore par les lumières du siècle, par le vœu de tous les peuples civilisés, par l’opinion, cette reine du monde, qui triomphe de tous les obstacles, et soumet toutes les résistances à ses lois. Sans la traite, vous ne pouvez plus transporter aux Indes occidentales, ces litières d’hommes, dont les sueurs et le sang formaient l’engrais de vos terres ; d’un autre côté, vous voyez planer sur le nouveau monde le génie de l’indépendance qui vous forcera bientôt à chercher des amis, des alliés là où vous ne comptiez que des esclaves. Qu’attendez-vous donc pour préparer un nouvel ordre de choses, pour prévenir des événemens que le temps, dont vous ne pouvez arrêter la marche, rend tous les jours plus prochains ? La raison, votre intérêt, la force des circonstances, les avantages de la nature, les richesses du sol ; tout ne vous dit-il pas que c’est en Afrique qu’il faut porter la culture et la civilisation ?

Sans examiner ici la question de savoir si le gouvernement doit se réserver exclusivement le droit de fonder les colonies sur ce continent, ou s’il doit encourager des sociétés coloniales, et s’en rapporter aux efforts de l’intérêt particulier convenablement dirigé, qu’il nous soit seulement permis de présenter quelques vues sur la marche prudente et mesurée que l’on devra se prescrire pour arriver à un but satisfaisant, non-seulement en ce qui concerne la civilisation des noirs, mais même relativement aux avantages commerciaux