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NAUFRAGE DE LA MÉDUSE.

sieur Corréard doit être assimilé à l’éditeur d’un journal, qui est responsable de plein droit de tous les articles qu’il contient[1].

Me Dumont, chargé de la défense du sieur Corréard, s’attache d’abord à établir, en droit, que la loi du 17 mai 1819 ne punit que l’offense personnelle envers les souverains étrangers ; et il invoque à cet égard l’opinion manifestée par Mgr le garde-des-sceaux sur la discussion à laquelle donna lieu l’art. 12 de cette loi. — « Le seul danger bien réel signalé par M. Bignon (disait S. Exc.), c’est que les tribunaux ne confondent la critique des actes des gouvernemens étrangers avec les offenses à la personne des souverains. Or, il suffit d’ajouter à ce mot offense ceux-ci : envers la personne des souverains, pour indiquer que la loi veut uniquement réprimer l’offense personnelle, et non pas la critique, et encore moins la discussion des actes des souverains étrangers. »

En fait, l’avocat cherche ensuite à faire résulter du

  1. Quoi ! parce que l’auteur d’un écrit publié par un autre, y introduit un raisonnement qu’il désapprouve ( Émile, tom. 2, pag. 72), et qui, dans une dispute, rejète les miracles ; il s’ensuit de là que non-seulement l’auteur de cet écrit, mais l’éditeur, rejète aussi les miracles ? Quel tissu de témérité ! Qu’on se permette de telles présomptions dans la chaleur d’une querelle littéraire, cela est très-blâmable et trop commun, mais les prendre pour des preuves dans les tribunaux ; voilà une jurisprudence à faire trembler l’homme le plus juste et le plus ferme qui aurait le malheur de vivre sous de pareils magistrats.