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CHAPITRE III.

trouver la mort qu’il cherchait à éviter au prix de l’honneur[1]

M. de Chaumareys néanmoins courut sur la chaloupe, et lui donna l’ordre de se charger de quinze à vingt hommes qui étaient restés sur la frégate. Quelques personnes de cette embarcation nous ont dit qu’on leur cria qu’il n’y en avait tout au plus qu’une

  1. (b) Le 5, vers les sept heures du matin, on fait d’abord embarquer tous les soldats sur le radeau, qui n’était pas entièrement achevé ; ces malheureux, entassés sur des morceaux de bois, ont de l’eau jusqu’à la ceinture.
    Les dames Chmaltz s’embarquent dans leur canot, ainsi que M. Chmaltz.
    Le désordre se met dans l’embarquement : tout le monde se précipite. Je recommanda de ne point se hâter, et d’attendre patiemment son tour. J’en donne l’exemple, et j’en fus presque la victime. Toutes les embarcations, emportées par le courant, s’éloignent et entraînent le radeau. Nous restons encore une soixantaine d’hommes à bord. Quelques matelots, croyant qu’on les abandonne, chargent des fusils, veulent tirer sur les embarcations, et principalement sur le canot du commandant qui était déjà embarqué. J’eus toutes les peines du monde à les en empêcher : il fallut toutes mes forces et tout mon raisonnement. Je parvins à me saisir de quelques fusils chargés et à les jeter à la mer.
    En me préparant à quitter la frégate, je m’étais contenté d’un petit paquet de ce qui m’était indispensable ; tout le reste était déjà pillé. J’avais partagé avec un camarade 800 livres en or, que j’avais encore en ma possession, et bien m’en arriva par la suite. Ce camarade était entré dans l’un des canots.