Page:Correspondance d’Eulalie, 1785.djvu/41

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J’ai vu hier ſur le Boulevard[1] une nouvelle débutante[2] nommée Joſephine ; elle eſt d’une beauté éblouiſſante. Tu dois juger qu’il faut que cela ſoit ; car nous autres femmes, ſoit foibleſſe, ſoit malignité, nous cherchons toujours à dépriſer celles à qui la nature a donné des avantages qu’elle nous a refuſés. Elle avoit avec elle une eſpèce de tante ou de mere. Le Marquis de Genlis la

  1. Depuis Pâques juſqu’au mois d’Octobre, on va ſe promener en voiture ſur le Boulevard. Les demoiſelles y étalent leurs grâces pour tâcher d’y faire des conquêtes. Les hommes ſont à pieds dans le milieu, et vont cauſer aux portieres des voitures des dames de leur connoiſſance. Il y a ordinairement les jours d’uſage d’y aller, c’eſt-à-dire, les Dimanches, Fêtes et Jeudi, quatre rangées de voitures, deux de chaque côté, dont l’une va et l’autre eſt arrêtée. Ils vont d’un côté depuis la porte St. Martin juſqu’à la demi-lune, et reviennent enſuite de l’autre. Sur les côtés du Boulevard, il y a des chaiſes à louer pour ceux qui veulent ſe repoſer.
  2. On appelle ainſi les demoiſelles qui n’ont pas encore été entretenues, et qui ſe font voir en public pour la premiere fois.