Page:Correspondance de P.-J. Proudhon, II.djvu/208

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sir ; et qu’en conséquence, nous ne devons pas poser l’action révolutionnaire comme moyen de réforme sociale, parce que ce prétendu moyen serait tout simplement un appel à la force, à l’arbitraire, bref, une contradiction. Je me pose ainsi le problème : faire rentrer dans la société, par une combinaison économique, les richesses qui sont sorties de la société par une autre combinaison économique. En autres termes, tourner en Économie politique, la théorie de la propriété, contre la propriété, de manière à engendrer ce que vous autres socialistes allemands appelez communauté, et que je me bornerai, pour le moment, à appeler liberté, égalité. Or, je crois savoir le moyen de résoudre, à court délai, ce problème : je préfère donc faire brûler la propriété à petit feu, plutôt que de lui donner une nouvelle force, en faisant une Saint-Barthélemy des propriétaires.

Mon prochain ouvrage, qui en ce moment est à moitié de son impression, vous en dira davantage.

Voilà, mon cher philosophe, où j’en suis, pour le moment ; sauf à me tromper, et, s’il y a lieu, à recevoir la férule de votre main ; ce à quoi je me soumets de bonne grâce, en attendant ma revanche. Je dois vous dire en passant que telles me semblent être aussi les dispositions de la classe ouvrière de France ; nos prolétaires ont si grand soif de science, qu’on serait fort mal accueilli d’eux, si on n’avait à leur présenter à boire que du sang. Bref, il serait à mon avis, d’une mauvaise politique pour nous de parler en exterminateurs ; les moyens de rigueur viendront assez ; le peuple n’a besoin pour cela d’aucune exhortation.

Je regrette sincèrement les petites divisions qui, à ce qu’il paraît, existent déjà dans le socialisme allemand, et dont vos plaintes contre M. G***[1] m’offrent la preuve.

  1. [Note de Wikisource] Grün