Page:Correspondance de P.-J. Proudhon, II.djvu/209

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Je crains bien que vous n’ayez vu cet écrivain sous un jour faux ; j’en appelle, mon cher Marx, à votre sens rassis. G***[1] se trouve exilé, sans fortune avec une femme et deux enfants, n’ayant pour vivre que sa plume. Que voulez-vous qu’il exploite pour vivre, si ce n’est les idées modernes ? Je comprends votre courroux philosophique, et je conviens que la sainte parole de l’humanité ne devrait jamais faire la matière d’un trafic ; mais je ne veux voir ici que le malheur, l’extrême nécessité, et j’excuse l’homme. Ah ! si nous étions tous millionnaires, les choses se passeraient mieux ; nous serions des saints et des anges. Mais, il faut vivre ; et vous savez que ce mot n’exprime pas encore, tant s’en faut, l’idée que donne la théorie pure de l’association. Il faut vivre, c’est-à-dire acheter du pain, du bois, de la viande, payer un maître de maison ; et ma foi ! celui qui vend des idées sociales n’est pas plus indigne que celui qui vend un sermon. J’ignore complètement si G***[2] s’est donné lui-même comme étant mon précepteur ; précepteur de quoi ? je ne m’occupe que d’Économie politique, chose dont il ne sait à peu près rien je regarde la littérature comme un jouet de petite fille ; et quant à ma philosophie, j’en sais assez pour avoir le droit de m’en moquer à l’occasion. G***[3] ne m’a rien dévoilé du tout ; s’il l’a dit, il a dit une impertinence dont je suis sûr qu’il se repent.

Ce que je sais et que j’estime plus que je ne blâme un petit accès de vanité, c’est que je dois à M. G***[4] ainsi qu’à son ami Ewerbeck la connaissance que j’ai de vos écrits, mon cher M. Marx, de ceux de M. Engels, et de l’ouvrage si important de Feuerbach. Ces messieurs, à ma prière, ont bien voulu faire quelques analyses pour moi en français (car j’ai le

  1. [Note de Wikisource] Grün
  2. [Note de Wikisource] Grün
  3. [Note de Wikisource] Grün
  4. [Note de Wikisource] Grün