Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 7.djvu/133

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Il recommande aux Français de l’oublier, et de chanter Louis vivant.

Chantez en Louis Quinze un autre Louis Douze ;
Aimez son sang, mes sœurs, la reine et mon épouse,
Veuve en qui je revis par les trois nourrissons
Qu’Henri, les trois Louis, elle et moi, vous laissons.

Si l’on fait de tels vers en paradis, M.  Piron y aura sûrement le pas sur M.  de Voltaire. Qu’on fasse des vers durs et plats en paradis, le mal n’est pas grand, surtout pour des oreilles de bois ; mais qu’on y soit intolérant, tout comme dans ce bas monde, cela est très-punissable. Le prince défunt conseille aux Français, entre autres :

De contempteurs Et purgez vos contrées
Des contempteurs de l’ordre et des choses sacrées,
Esprits perturbateurs, dont l’orgueil impuni
Sèmerait dans vos champs l’ivraie à l’infini.


Voyez-moi un peu ce vieux coquin qui, pour obtenir de Dieu le pardon de ses péchés, croit n’avoir rien de mieux à faire que d’exterminer tout homme qui ne pense pas comme lui !

Fréquentez mes autels, et respectez mes prêtres.
Croyez, pensez, vivez comme ont fait vos ancêtres !


C’est un moyen sûr de rester aussi sots qu’eux. On pourrait observer à M.  le Dauphin qu’il a oublié une chose essentielle au rosier du monde. Unum porro est necessarium[1]. Que Piron se fasse capucin sans perte de temps, et qu’il se taise.

— Ma foi, j’aime mieux ce fou de Rameau le neveu que ce radoteur de Piron. Celui-ci m’écorche l’oreille avec ses vers, m’humilie et m’indigne avec ses capucinades ; l’autre n’a pas fait la Métromanie à la vérité, mais ses platitudes du moins me font rire. Il vient de publier une Nouvelle Raméide[2]. C’est la seconde, qui n’a rien de commun avec la première que le but de l’ouvrage qui est de procurer du pain à l’auteur. Pour cela il avait demandé un bénéfice dans la première Raméide, comme

  1. Luc, x. 42.
  2. Voir précédemment, p, 61.