Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 7.djvu/134

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chose qui ne coûterait rien à personne, et tout disposé à prendre le petit collet. Dans la seconde, il insiste encore un peu sur le bénéfice, ou bien il propose pour alternative de rétablir en sa faveur la charge de bouffon de la cour. Il montre très-philosophiquement dans son poëme combien on a eu tort d’abolir ces places, de les faire exercer par des gens qui n’en portent pas le titre et qui n’en portent pas la livrée. Aussi tout va de mal en pis depuis qu’il n’y a plus de bouffon en titre auprès des rois. Le Rameau fou a, comme vous voyez, quelquefois des saillies plaisantes et singulières. On lui trouva un jour un Molière dans sa poche, et on lui demanda ce qu’il en faisait. « J’y apprends, répondit-il, ce qu’il ne faut pas dire, mais ce qu’il faut faire. » Je lui observerai ici qu’il fallait appeler son poëme Ramoïde, et non Raméide ; la postérité croira qu’il s’appelait La Ramée.

M.  Bouchaud, docteur agrégé de la Faculté de droit, connu par un Essai sur la poésie rhythmique, et par un autre sur quelques points de jurisprudence criminelle, traduit de l’anglais, entreprend aujourd’hui d’éclaircir toute l’affaire de l’impôt chez les Romains, et, pour faire preuve de son savoir-faire, il vient d’en publier un échantillon en deux Essais historiques : un, sur l’impôt du vingtième sur les successions ; l’autre, sur l’impôt sur les marchandises, chez les Romains ; ces essais, dédiés à l’Académie royale des inscriptions et belles-lettres, forment un gros volume grand in-8o de près de cinq cents pages, dans lequel il y a plus de notes et de citations que de texte. Je crains que l’ouvrage du célèbre Burmann, De Vectigalibus populi Romani, n’ait été la principale source où M.  Bouchaud ait puisé ses connaissances, et qu’il n’ait grossi son ouvrage en rapportant tous les passages que l’autre s’est contenté d’indiquer ; je ne blâme pas qu’on mette à profit les recherches immenses des savants des xvie et xviie siècles, mais, bien loin d’imiter leur prolixité, il faudrait tâcher de les réduire à des résultats courts, précis et clairs, afin qu’on sût à quoi s’en tenir sur chaque matière. D’ailleurs ces sortes d’ouvrages devraient être écrits en latin, parce qu’on est obligé d’y employer à tout moment des termes impossibles à traduire, et qu’il en résulte un style chamarré et à moitié barbare. M.  Bouchaud s’est jeté dans l’érudition depuis quelques années qu’il s’est marié. Il était autrefois libertin, vaporeux et mordant. Avec sa grosse figure