Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 7.djvu/173

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sottises et des querelles dans toutes les conditions de la vie. »

Le libraire de Paris a ajouté à son édition la Lettre de M.  de Voltaire à Jean-Jacques Pansophe, imprimée depuis plusieurs mois à Londres, mais qui ne s’était pas répandue en France[1]. Cette lettre est aussi tronquée en quelques endroits, autant que je puis m’en souvenir. Je me rappelle très-bien, par exemple, que la profession de foi que M.  de Voltaire opposait à celle de Jean-Jacques Pansophe commençait ainsi : « Je crois en Dieu de tout mon cœur, et en la religion chrétienne de toutes mes forces. » Au reste, M.  de Voltaire persiste à dire que cette lettre n’est point de lui. Il prétend qu’elle est de M.  l’abbé Coyer[2]. Je conseille à l’abbé Coyer de prendre M.  de Voltaire au mot, et nous dirons que cette lettre est ce que M.  l’abbé Coyer a écrit de mieux, quoique je n’aie pas encore pu vaincre la conviction intérieure qui me crie qu’elle appartient à M.  de Voltaire, malgré toutes ses protestations. M.  Rousseau, de son côté, a écrit à son libraire de Paris, après la lecture de l’Exposé succinct, qu’il trouve M.  Hume bien insultant pour un bon homme et bien bruyant pour un philosophe, et qu’il trouve surtout les éditeurs bien hardis. Du reste, il ne s’explique pas davantage. Il paraît que tout ce qu’il avait de partisans parmi les personnes de premier rang, nommément M.  le prince de Conti et Mme  la comtesse de Boufflers, ont pris fait et cause pour M.  Hume. Si M.  Rousseau était sage, il laisserait tomber toute cette absurde et vilaine querelle ; il se hâterait de donner quelque nouvel ouvrage dont le succès effacerait bientôt, du moins pour quelque temps, jusqu’au souvenir de ses torts.

Ce qui vaut un peu mieux que cette tracasserie, beaucoup trop fameuse, c’est que M.  de Voltaire vient d’envoyer à son ami M.  d’Argental, chargé de tout temps du département tragique, une tragédie toute nouvelle qui a été reçue à la Comédie-Française par acclamation. On dit que nous y verrons le contraste des mœurs des Scythes avec les mœurs asiatiques, et que le sujet est d’ailleurs entièrement d’invention. On dit aussi que le patriarche travaille à un roman théologique ; et pour peu

  1. Voir précédemment, page 33.
  2. En attribuant à l’abbé Coyer la Lettre au docteur Pansophe, Voltaire était dans l’erreur, L’auteur, nous l’avons déjà dit, était Borde de Lyon. (T.)