Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 7.djvu/194

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en deux parties. Ces trois infortunées sont Émilie, la comtesse d’Orbeval et Julie. Je crains que Mme la marquise de Luchet, à qui ce roman est dédié, n’en fasse bientôt la quatrième. C’est cette Mlle Delon, de Genève, aimable, gaie, folle, qui a épousé, il y a quelque temps, un homme de condition, appelé M.  de Luchet, à qui le besoin a fait faire le métier d’auteur et en fait faire tous les jours de plus mauvais. Je crains que cette pauvre Mme de Luchet, tout en chantant et en dansant, n’arrive incessamment à l’hôpital, où l’auteur de l’École des pères et des mères pourra lui servir de maréchal des logis, s’il n’a pas d’autre ressource pour vivre que la table de ses trois infortunées.

— Les Aventures philosophiques[1], qui paraissent déjà depuis quelque temps, font un petit volume in-12 de deux cents pages, qui conte ennuyeusement l’histoire de trois philosophes modernes, dont il y en a un qui a à peu près les opinions de M.  Rousseau. L’auteur se croit un malin peste. Il prétend avoir fait son roman avant Candide ; mais celui-ci l’a gagné de vitesse, et il meurt de peur que ses Aventures philosophiques ne passent pour un réchauffé de Candide. Il peut être tranquille. Personne ne lui fera une injustice aussi criante. Un réchauffé exige un peu de chaleur, et heureusement ces Aventures philosophiques sont d’un froid et d’une platitude qui garantissent l’auteur à jamais de toute comparaison avec Candide.

— Si vous envoyez tout cet énorme fatras d’inutilités au corps des épiciers, vous accorderez à Mme Robert le pas sur toute la confrérie. Nicole de Beauvais, ou l’Amour vaincu par la reconnaissance, qu’elle vient de publier en deux parties, est bien digne de figurer à côté de ses autres ouvrages, dont elle a soin d’indiquer les titres et le prix. Il faut que Mme Robert travaille pour la province ou pour les pays étrangers, car à Paris il n’y a âme qui vive qui ait jamais entendu parler de Mme Robert et de ses romans.

M.  l’abbé Coyer a fait au commencement de cette année une brochure intitulée De la Prédication. C’était un excellent sujet médiocrement traité. Aussi ces petits ouvrages manqués amusent Paris à peine deux fois vingt-quatre heures, et tombent ensuite dans un oubli éternel. Le but de M.  l’abbé Coyer était

  1. Par Dubois-Fontanelle.