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AOUT 1767.

jésuites. Il vient d’en faire un autre encore sous le titre de Seconde lettre à M. ***, conseiller au parlement de **** sur l’édit du roi d’Espagne pour l’expulsion des jésuites de ses royaumes, États et domaines. C’est un petit écrit de deux feuilles au plus. Ma foi, il ne résulte rien de toutes ces brochures de M. d’Alembert sur les malheurs de la Société, sinon qu’il a aussi voulu dire son petit mot sur un évènement si célèbre, et qu’il a tâché de faire enrager les jansénistes autant que les jésuites. Mais, au fond, tout cela fait du verbiage sans sel, sans nerf, sans gaieté, avec beaucoup de prétention à la plaisanterie et sans résultat. On pouvait dire cela en causant avec ses amis aux Tuileries, ou bien au coin de son feu ; mais en conscience cela ne valait pas la peine d’être imprimé.

— On a traduit de l’anglais de Gordon le livre The independent whigt, et on lui a donné en français le titre l’Esprit de l’Église, ou bien l’Esprit du clergé[1], car je n’ai point vu cette traduction, qui se vend très-cher et fort secrètement. Vous savez que ce livre est une des plus vigoureuses sorties sur l’esprit de domination et d’envahissement des prêtres ; et si vous vous rappelez les remarques de Gordon sur Tacite, vous croirez aisément qu’il ne pèche pas dans cet ouvrage-ci par un ton trop doucereux ou trop peu violent.

— J’ai eu l’honneur de vous parler d’une traduction française qu’on a faite de l’ouvrage de Justus Febronius sur la puissance des papes, qui a fait tant de bruit en Allemagne et qui a tant déplu à Rome[2]. Presque en même temps, un honnête janséniste, plus sage qu’à janséniste n’appartient, a publié une espèce de traduction libre du même ouvrage de Febronius. Il en a retranché des choses qui ne pouvaient intéresser un lecteur français ; il a quelquefois ajouté pour éclaircir ce qui lui a paru obscur. Il a adouci des expressions trop dures pour la cour de Rome, et il a supprimé toutes les sorties trop vives

  1. Le titre exact est l’Esprit du clergé, ou le Christianisme primitif vengé des entreprises et des excès de nos prêtres modernes. Londres (Amsterdam, Rey, 1767 2 vol. in-12), traduit de J. Trenchard et de Thomas Gordon, par d’Holbachh et Naigeon. Ce dernier, au dire de son frère, l’avait « athéisé » le plus qu’il avait pu.
  2. Voir page 308. Ce livre est de J.-N. de Hontheim, évêque in partibus de Myriophite, suffragant de l’électeur de Trèves, qui a signé divers traités sous le pseudonyme de Justus Febronius. Le traducteur était J. Remacle Lissoir, premontré.