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CORRESPONDANCE LITTÉRAIRE.

écrivain de droit public en France ne peut s’écarter des préventions parlementaires sans risquer d’être cité à la barre, et même, suivant l’exigence du cas, décrété de prise de corps ; ce despote légal et ses satellites sont dignes de figurer dans les petites-maisons à côté du père éternel, ayant M. de La Rivière comme héraut d’armes à leur tête. Il ne faut jamais avoir connu les hommes, il faut n’avoir ni lu ni ouvert aucun monument historique pour écrire des rêves pareils.

Toute la théorie des impôts, qui fait la seconde partie, et qui est exactement calquée sur les principes de MM. les économistes ruraux, n’est qu’un fatigant et insipide commentaire du lieu commun qu’il ne faut pas imposer un pays au delà de ses forces. Je vous défie de tirer de tout ce bavardage aucune autre vérite utile. Le droit qu’on attribue au souverain de partager en sa qualité de co-propriétaire dans le produit net n’est qu’une pure tournure, sous laquelle M. de La Rivière présente cette vérité incontestable qu’il n’est pas juste de prendre à ses sujets plus qu’ils ne peuvent donner. Cette tournure serait même dangereuse, si quelque chose de ces messieurs pouvait être, en ce qu’accordant au plus fort la co propriété de tout, ils l’invitent au partage du lion, du moins jusqu’à ce que l’évidence ait changé l’essence des choses. L’idée de lever l’impôt immédiatement sur le produit net, au prorata du produit net, est une chimère des plus complètes, car ce produit net est par son essence incertain, variable, inconnu et caché ; et comment asseoir une imposition publique et permanente sur une base si mouvante ? Dans cette contestation éternelle du gouvernement qui a besoin, et du sujet qui se dit hors d’état de payer, comment déterminer avec justice ce qui peut être payé au fisc de l’État par une province, sans que les habitants soient foulés ? C’est ce tarif que messieurs les économistes sont priés de faire passer au sceau de l’évidence à leur première assemblée. Avant l’évidence de ce tarif, l’évidence de leur théorie sur l’impôt sera aussi inutile que vox clamantis in deserto.

La troisième partie du livre de M. de La Rivière, qui traite de l’industrie et de ses effets, est la moins déraisonnable ; elle renferme cependant assez de propositions outrées et hasardées. Poser d’un côté pour principe que la consommation est la mesure de la reproduction, comme la reproduction est la