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CORRESPONDANCE LITTÉRAIRE.

quantité de denrées, il est évident que le consommateur sera obligé de payer le surcroît de dépense qu’exige le mauvais chemin, et qu’il profitera de la diminution que lui procurera le bon. Dans ces matières, monsieur Dupont, il faut aller au fait et être de la plus grande clarté et de la plus grande concision possibles. Si vous n’étiez pas entiché du langage apocalyptique des économistes ruraux, vous vaudriez beaucoup mieux. Mais vous voulez manifester aux propriétaires l’évidence de leur propre intérêt ; vous me mettez à tout moment les épithètes sacramentelles de votre secte en italique, de peur que je n’y prenne pas assez garde, et vous m’ennuyez. Laissez ces manipulations de termes et de formules à vos hommes creux du mardi. Que M. de La Rivière nous parle de biens disponibles et non disponibles que le prémontré Baudeau partage aussi les hommes en disponibles et non disponibles : ils peuvent compter que s’il n’y a que moi qui en dispose, ils ne deviendront de leur vie disponibles. Mais vous, revenez au naturel, puisque vous paraissez y avoir de la pente. Dites tout simplement qu’on doit payer ceux qu’on emploie à la construction des chemins, et qu’il faut y employer les troupes en temps de paix, parce que c’est vrai, et que c’était l’usage des Romains, dont la discipline militaire valait bien la nôtre ; et quand vous avez proposé vos idées sur quelque objet, n’y ajoutez plus les lieux communs de vos rêve-creux du mardi rural.

Le second écrit qui a paru, et qu’on dit favorisé par le gouvernement, est intitulé Considérations sur les compagnies, sociétés et maîtrises, et forme une brochure in-12 de cent quatre-vingts pages, dont l’auteur ne s’est point fait connaître. Cet auteur n’est pas un homme lumineux, c’est un homme de bon sens tout court. Il s’élève contre les privilèges, les communautés, les maîtrises, comme contre autant d’entraves qui gênent l’industrie. Il prétend que les règlements sans fin qu’on a fait sur tous les objets du commerce, et les inspecteurs sans nombre qu’on a créés pour présider à leur exécution, n’ont servi qu’à ruiner notre commerce, et j’en suis convaincu. Pas trop gouverner est une des plus précieuses maximes de tout gouvernement sensé. Vous voulez que le commerce fleurisse dans vos États ? Faites des routes, rendez vos rivières navigables, ouvrez des canaux, facilitez les communications par tous les